14 janvier 2018

Temps de lecture : 4 min

Les périls de la perception, l’autre menace de l’ultra-connexion

Les dangers de l'omnipotence des smartphones et de Facebook sur le tissu social et les rapports humains sont d'actualité. Le débat dépasse les seuls usages et comportements. Mais ne surestimons nous pas notre ultra-connexion ? Ipsos le pense, étude à l'appui.

Les dangers de l’omnipotence des smartphones et de Facebook sur le tissu social et les rapports humains sont d’actualité. Le débat dépasse les seuls usages et comportements. Mais ne surestimons nous pas notre ultra-connexion ? Ipsos le pense, étude à l’appui.

« Nous sommes tous prisonniers de la perception qu’ont les autres de nous. » C’est bien ça le problème et Pilgrim, le héros schizophrène du roman éponyme de Timothy Findley, sait de quoi il parle. S’il ne faut jamais sous-estimer le poids d’autrui dans la balance du jugement de soi, il ne faut pas non plus sur-estimer la justesse de la perception subjective sur la réalité objective. Surtout quand elle est collective. Par exemple, est-ce que les smartphones et Facebook sont aussi omniprésents dans notre quotidien qu’on ne le pense, alors que le premier réseau social de la planète est vilipendé par un ancien dirigeant et surveillé de près par le pouvoir législatif aux Etats-Unis ? Le baromètre international  » Perils of Perception  » d’Ipsos répond à la question. Mais comme chaque sondage, il révèle d’abord sa propre vérité.

Réalisée du 28 septembre au 19 octobre 2017 sur 29 133 personnes dans 38 pays, l’étude au nom de roman noir orwelien constate que dans la plupart des pays du monde, la population surestime l’importance des smartphones et des réseaux sociaux chez leurs concitoyens. Selon les Français, 82% de la population possède un smartphone contre seulement 65% en réalité. Aux Philippines, en Indonésie, en Inde ou en Colombie, où le taux d’équipement en smartphone ne dépasse pas 35%, la tendance à la surestimation est encore plus nette avec des écarts de près de 50 points. Seuls les Danois sous-évaluent les faits, avec seulement deux points d’écart: la population est équipée à 89% de smartphone, alors qu’elle évalue le taux d’équipement à 87%.

« Les résultats mettent en évidence que le buzz et la publicité troublent la manière dont les réalités sont comprises quand il est question des nouvelles technologies », assure l’étude. Autre erreur de perception, 47% des Français de plus de 13 ans ont un compte Facebook. C’est 21 points de moins que ce que croient les Français, qui estiment en effet que 68% de leurs concitoyens sont connectés au réseau social.La part de personnes de plus de 13 ans possédant un compte Facebook est la mieux évaluée au Royaume-Uni (58%), en Norvège (60%) et à Singapour (67%), même si les chiffres avancés restent de 16 points supérieur à la réalité. L’Inde, l’Indonésie, l’Afrique du Sud et les Philippines sont les champions des surévaluations, avec des dépassements de 50 points entre mythe et réalité.

Les Français se trompent et en sont conscients

« La méthodologie de l’enquête joue probablement un rôle dans cette surestimation dans les pays en développement : comme elle est réalisée en ligne, les répondants sont souvent des internautes appartenant à des catégories plus aisées, plus urbaines et plus diplômées que le pays tout entier ; leur perception reflète davantage la réalité de leur environnement social que celle de la population dans son ensemble, même si le taux d’équipement en mobile progresse chaque année », commente Yves Bardon, directeur du programme Flair au Ipsos Knowledge Center. L’analyse permet de relativiser des conclusions à ne pas trop facilement tirer de ce sondage mondial.

D’ailleurs, à l’exercice des perceptions, les Français sont-ils bons élèves ? D’après « Perils of Perception », l’Hexagone pointe à la 16e place des pays qui se trompent le plus. Mais « avec 14% de personnes interrogées confiantes de leur réponse, les Français étaient finalement assez conscients de leur niveau », précise Yves Bardon. Les pays où la perception des habitants est la plus éloignée de la réalité sont l’Afrique du Sud, le Brésil, ou encore l’Inde. Le prix d’excellence en matière de discernement revient à la Suède et à deux autres pays scandinaves qui arrivent juste derrière : la Norvège et le Danemark.

Derrière les algorithmes, un désir d’emprise et de contrôle

Quasiment simultanément à la publication du baromètre d’Ipsos, Google et TNS rendaient publiques les conclusions de leur étude annuelle sur les usages des nouvelles technologies à travers le monde. Il en ressort que pour la première fois, le web mobile a franchi la barre des 50% d’utilisateurs dans les 63 pays étudiés par le  » Baromètre Consommateur « . En France, 67% des internautes accèdent au web via un mobile, contre une moyenne de 65% dans le monde entier. Les internautes ont clairement une préférence pour le mobile : dans 62 pays ils déclarent privilégier le smartphone au desktop pour accéder à Internet.

Derrière ces chiffres se cachent des enjeux sociaux fondamentaux qu’INfluencia décrypte et explique en essayant de prendre un maximum de recul. Nous ne sommes pas les seuls, heureusement?  » J’ai ainsi découvert au détour d’un article de journal que le PDG de Roomba, qui fabrique et vend des robots aspirateurs, réfléchissait à vendre les données collectées de ses clients à Google. Et que donc les robots aspirateurs – mon robot aspirateur ! –  » aspirent « , en plus de ma poussière, des données sur la surface de mon habitation, la nature de mon sol, la composition de ma famille etc… », analyse ainsi le psychiatre, docteur en psychologie et producteur de l’émission de France Culture  » Matières à penser « , Serge Tisseron, dans Alternatives Economiques.

« Il faut bien comprendre que derrière ces machines, qu’on nous présente comme rationnelles et logiques, se loge le désir d’emprise de ceux qui les fabriquent. Facebook, Google, et tous les autres veulent devenir les maîtres du monde, cela ne fait aucun doute. Leur grand mensonge c’est de nous présenter ces outils comme guidés uniquement par des algorithmes soi-disant intelligents, extrêmement rationnels, alors que leur objectif est de nous connaître, d’influencer nos achats. Si nous n’y prenons pas garde, peut-être un jour de nous contrôler. » Est-ce que l’opinion publique en a conscience alors que Facebook par exemple s’en défend, assurant même être prêt à réduire ses profits pour le prouver ? Tout dépend de sa perception…

Retrouver l’étude complète en cliquant sur la photo ci-dessous!
 

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