22 mai 2016

Temps de lecture : 4 min

Plus de volks moins de wagen

La dernière campagne de Volkswagen joue sur la corde sensible pour mieux se faire pardonner du " diesel gate ". Et le moins que l'on puisse dire c'est que cette nouvelle stratégie est habile et bien mise en scène. Décryptage...

La dernière campagne de Volkswagen joue sur la corde sensible pour mieux se faire pardonner du  » diesel gate « . Et le moins que l’on puisse dire c’est que cette nouvelle stratégie est habile et bien mise en scène. Décryptage…

L’humain et l’humour sont des thèmes de prédilection pour Volkswagen et DDB°Paris. Deux territoires depuis toujours parfaitement exploités quel que soit le support (TV, presse, affichage, réseaux sociaux…) quel que soit l’objectif (modèle, cible, actualité, promo…). Récemment -et très logiquement- celui de l’humain a été privilégié pour répondre au Diesel Gate, ultime trahison, auquel le groupe doit faire face depuis l’automne 2015. « Ces derniers mois, ici notre mot d’ordre est plus de volks, moins de wagen », confirme Alban Callet, DGA en charge de VW chez DDB°Paris. Résultat, quasiment immédiatement après la révélation du scandale, l’agence parisienne est la première du réseau à faire tomber le fameux « Das Auto », coupable à la fois de synthétiser cynisme et malversations critiquables de l’entreprise, et d’exprimer une référence à l’automobile qui a fait son temps. « Cette signature devait être effacée, car elle incarnait une vision hégémonique », souligne Alban Callet « et aussi terrible soit-elle, cette crise est un mal pour un bien. Elle a été l’occasion en terme de communication pour les équipes de se remettre en cause, de reconsidérer l’approche globale, de se poser et de préparer l’avenir ».

Se remettre en cause et préparer l’avenir

Une évolution stratégique bien amorcée comme le démontre la deuxième partie de la campagne « Volkswagen et moi » dont le  premier opus avait été lancé à l’international en mars dernier, pour rappeler d’une part que la relation à la marque se construit avec la voiture mais surtout autour des moments qu’elle permet de vivre. Et d’autre part, pour inviter à se rendre sur le site VWetMoi.fr et y déposer des photos qui racontent justement son histoire vécue avec sa Volkswagen. De vraies photos de vraies personnes témoignant d’une météo, d’un week-end, d’un endroit, d’un événement… donnant naissance à une série de 25 annonces choisies parmi 1500 contributions et publiées en temps réel en presse magazine. Préparant judicieusement le terrain pour cette suite franco française orchestrée par DDB°Paris en collaboration avec Fove et Mediacom et diffusée en TV, cinéma, web et social. « Nous n’avons reçu aucun brief particulier », détaille Alban Callet « nous avons été simplement opportunistes en utilisant la campagne internationale pour aller plus loin et donner encore plus de place aux gens ». Replaçant ainsi en toute humilité la voiture comme un moyen et non comme une fin, et donnant la part belle à la relation entre le conducteur et l’automobile, élément de sa vie comme un autre mais qui a son importance.

Du pur brand content créatif

Guidée par cette nécessité marketing de se renouveler et de redistribuer des preuves d’amour, cette nouvelle campagne est très justement réalisée, comme des reportages, par Pierre Stine et produite par Fighting Fish, des habitués des tournages de contenus de marque du réel. Pensée par les créatifs, Mélanie Pennec et Jean Wessa, elle fait oublier, comme aux protagonistes, le dispositif et la caméra, et joue à fond la carte du temps, de la spontanéité, de l’émotion et de l’authenticité. Avec à la clef une surprise pour François et Maïa, les héros des deux films qui ne sont pas des acteurs mais des personnes « castées » -parmi 10 autres- ayant eu une relation très forte avec respectivement leur Golf VR6 et Transporter T3 dont ils ont néanmoins dû se séparer à regret. « Un vrai challenge, car tout devait se faire dès la 1ère prise pour capter et préserver la fraîcheur du récit et la magie de l’instant révélation. L’annonceur l’a pourtant immédiatement validé », évoque Alban Callet. Une petit bémol toutefois, car malgré l’intelligence de cette copie publicitaire, elle n’est pas sans rappeler celle pour Chevy, sortie depuis quelques années aux USA.

Quant au propos, il est également gonflé. Car alors que les nouvelles immatriculations de la marque n’affichent en France, qu’un modeste +1,8% depuis le début de l’année par rapport à la même période en 2015 -laissant penser que 2016 ne sera pas celle d’une folle croissance- à aucun moment les films ne cherchent à vendre une voiture, ne parlent de prix, de prouesses techniques, ou à précipiter les clients dans les concessions. De même, ils sont très corporate gommant complètement l’angle du surcoût, des embouteillages et de la pollution qu’un véhicule ne manque pas d’évoquer, en positivant plutôt sur comment on vit la voiture et en suggérant le luxe que représente une heure partagée avec un ami le temps d’un voyage ou la qualité de la musique que l’on y écoute… Rompant également avec le fâcheux réflexe de la communication de ce secteur qui est de s’adresser uniquement à des acheteurs potentiels via un contenu automobile centrique. « Pour une marque automobile, il est important en communication de rayonner en dehors de la vente. Car 99% des individus ne sont en général pas concernés par l’acte d’achat. En revanche, ils captent le message qui sort des sentiers battus qui peut porter ses fruits le moment venu », insiste Alban Callet. Un peu comme avec « Nights », spot réalisé par Nacho Gayan (Stink) et décliné en avril dernier, qui mettait déjà fortement les gens au cœur de son histoire tout en traitant de la sécurité. Pourtant bien que très beau (réalisation, musique, ambiance…), son idée était un peu trop flottante voire ésotérique pour être parfaitement aboutie et bien décodable par le public.

Humain et humilité avant de renouer avec l’humour

Il y a 8 mois, INfluencia se demandait pourquoi Volkswagen restait sans voix face au scandale du logiciel des moteurs truqués. Peut-être pour mieux trouver sa nouvelle voie, comme le laisse supposer cette campagne « mea culpa » déguisée mais convaincante. Car en offrant du pur brand content créatif, elle puise très loin et très fort dans les souvenirs, les sensations et l’engagement pour mieux offrir au spectateur l’occasion de se forger une opinion différente, de se réconcilier et pourquoi pas de renouer avec la confiance. Histoire -exactement comme dans une relation de couple- de tendre la main et d’inviter à passer l’éponge sur la trahison compte tenu de tout ce qui a été partagé et vécu depuis tant d’années. Une affaire prise très au sérieux et avec humilité donc qui pourtant ne va pas interdire au duo VW/DDB°Paris comme le promet Alban Callet : « d’exploiter très bientôt, l’autre sillon de la marque : l’humour ».

 

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