ILLUSTRATIONS
de laurent duvoux
LES NOUVEAUX CHEMINS DE LA CITOYENNETÉ

Par
David Lacombled
FAIRE DU WEB ET DES RÉSEAUX SOCIAUX UN ESPACE DE CITOYENNETÉ EST UN ENJEU COLLECTIF, MAIS QUI PASSE PAR CHACUN D’ENTRE NOUS. UNE DES CLÉS : UNE MEILLEURE COMPRÉHENSION DE SES CODES (SOCIAUX) ET DE SON CODE (NUMÉRIQUE) POUR CONSTRUIRE UN ÉCOSYSTÈME DU VIVRE-ENSEMBLE. C’EST AVANT TOUT UN ENJEU D’ÉDUCATION, ET DONT LES LIGNES QUI SUIVENT POURRAIENT ÊTRE LE MANIFESTE.











































#JESUISCHARLIE, #JESUISPARIS…

















































































LORSQUE TOUT RASSEMBLEMENT EST RENDU IMPOSSIBLE, LES RÉSEAUX SOCIAUX JOUENT PLEINEMENT CE RÔLE FÉDÉRATEUR








































CE QUI VAUT POUR LES « PERSONNES » VAUT ÉGALEMENT POUR LES MARQUES
Comme lors des attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo et l’Hyper Casher, Internet et les réseaux sociaux ont été au cœur même des événements qui ont secoué la France le 13 novembre. Encore une fois, les réseaux sociaux ont été dès le commencement aux avant-postes en donnant minute par minute (notamment sur Twitter) des informations sur ce qui était en train de se passer à Paris. Puis, aussitôt, la solidarité et l’échange se sont invités, démontrant ainsi que les réseaux sociaux, outre leur rôle d’information, possèdent une dimension sociale forte. Ce fut le cas avec le hashtag #PortesOuvertes, qui a émergé instantanément sur Twitter, où certains offraient spontanément la possibilité à ceux qui se trouvaient sur les lieux des événements de venir se réfugier chez eux. De même, le « Safety Check » mis en place par Facebook le soir même a permis à chaque membre habitant Paris de se signaler afin de rassurer ses proches et ses amis sur sa situation.


LE CŒUR « VIRTUEL » DU COLLECTIF

S’ils ont été au cœur des événements, les réseaux sociaux ont aussi été le cœur des événements. Immédiatement, Facebook, Twitter, Instagram se sont mués en « chapelle ardente », où les messages de sympathie, d’empathie, de solidarité et de soutien se sont échangés. À #JeSuisCharlie a succédé #JeSuisParis. Le symbole Peace for Paris, variation du Peace and Love, une tour Eiffel enchâssée dans le signe de la Paix, dessiné par l’illustrateur Jean Jullien est devenu le signe de ralliement. Les photos de profil se sont subitement parées d’une trame bleu blanc rouge en signe de solidarité internationale et de fierté française…

Ce partage émotionnel via les réseaux, s’il avait été très important en janvier, a été tout simplement vital en novembre. Tout type de rassemblement étant rendu impossible du fait de la mise en place de l’état d’urgence et annulant de fait une grande marche unitaire comme celle du 11 janvier 2015 – qui avait permis de cristalliser et d’incarner le sentiment d’appartenance –, les réseaux sociaux ont joué pleinement ce rôle fédérateur.

Imagine-t-on ce que cela aurait été sans Facebook, Twitter, Instagram et autres ? Comment aurait pu s’exprimer ce vif besoin de partage et de solidarité ? Comme le remarque le sociologue et spécialiste des réseaux sociaux Benjamin Loveluck, dans une interview à M, le magazine du Monde, le « like » dans ces moments tragiques est devenu « une main sur l’épaule virtuelle ».


LA DIMENSION DE TOUS LES POSSIBLES

On a pu, ici ou là, reprocher aux réseaux sociaux de se réduire à une pure approche compassionnelle. Peut-être… Mais l’empathie n’a pas la prétention de résumer l’engagement en entier. Elle n’en est qu’un moment. Et quand bien même, si c’était le cas, n’est-ce pas aussi par ce lien émotionnel que prend naissance l’expression de la citoyenneté ? Comme une première étape, celle du sentiment d’appartenance à une communauté. Une première étape nécessaire comme la conscience d’un enjeu collectif.

Car les réseaux sociaux sont souvent décriés comme porteurs d’expressions individualistes, voire narcissiques. Et dès que des événements cruciaux adviennent, ils apportent la preuve que ces mêmes réseaux n’usurpent pas le qualificatif de « sociaux ». Ils démontrent qu’ils sont capables d’assumer une dimension collective et constructive. Au-delà de la compassion, ils sont aussi le lieu d’enjeux collectifs et le vecteur d’actions citoyennes, comme les pétitions en ligne, des mouvements de solidarisation pour une cause, des entrées pour le financement coopératif de projets, le crowdfunding, des appels à l’engagement…

Pour autant, il ne s’agit pas d’idéaliser. Dans le même temps, avec une concordance frappante, la réalité nous montre que les réseaux sociaux et Internet hébergent également des messages de dérives, de dérapages, des expressions de haine… Alors, avec la même régularité, apparaît aussi le cortège de ceux qui tiennent le coupable idéal : Internet et les réseaux sociaux, la source de tous les maux et de toutes les dérives. Et de reprendre le même chapelet de propositions visant à encadrer et à mettre sous contrôle Internet.

Outre que cela est totalement irréalisable – la ligne Maginot semble avoir encore ses adeptes ! –, cela n’empêchera pas les dérives d’exister. Qu’il faille en appeler à la responsabilité de certains acteurs du Net est une chose, mais penser contrôler et sélectionner ce qui se dit ou s’écrit sur Internet est utopique et nous mènerait tout droit à la dystopie. Quelle citoyenneté serait encore possible dans un lieu où tout est mis sous coupe réglée ? Internet est par essence un espace de liberté. C’est dans cet espace ouvert, qui s’invente et se réinvente en permanence, que la citoyenneté peut et doit s’exercer.


LA CONJUGAISON DES LIBERTÉS INDIVIDUELLES

Internet ne nous est pas extérieur : c’est un écosystème que nous construisons tous ensemble, individuellement et collectivement. La citoyenneté sur Internet, c’est une écologie du vivre-ensemble, une façon de conjuguer liberté et responsabilité à l’échelle de chaque individu. Or, cette citoyenneté ne se décrète pas, elle se construit d’abord à l’échelle de chaque individu. Il faut oser la comparaison avec l’attitude écologique : il existe aussi sur Internet des comportements polluants et d’autres responsables, des attitudes nuisibles et d’autres durables.

Cela commence par la simple étiquette (ce que l’on a appelé un temps la Netiquette, la formulation d’une sorte de contrat social sur Internet) des simples règles de savoir-vivre ; cela peut aussi revêtir la forme de vigilance par rapport aux informations colportées (et on a pu voir circuler de nombreuses contre-vérités et photos truquées ou antidatées sur les réseaux sociaux) jusqu’aux démarches de lanceurs d’alerte…

Ce qui vaut pour les « personnes » vaut également pour les « personnes morales », à savoir les entreprises et les marques. Ces dernières ont la capacité aussi à développer un comportement citoyen sur Internet. La publicité y joue un rôle important, notamment de permettre à la pluralité des contenus d’exister grâce à son financement, mais elle doit le faire dans le respect de l’écosystème général d’Internet, et de l’internaute, en étant créative et non agressive. Ainsi constitue-t-elle une véritable plus-value.


UN ENJEU D’ÉDUCATION

Il n’existe pas de dogme protecteur ou de morale extérieure, de table de la loi gravée dans le marbre une fois pour toute. Sur Internet, tout est affaire d’éthique personnelle en work-in-progress, car le changement est une constante d’Internet. La citoyenneté est plus affaire d’esprit que de lettres.

Et si justement cet esprit citoyen était une affaire d’éducation ? Notre conviction est que la pratique d’Internet doit être au cœur de l’éducation. Pas seulement comme moyen d’apprendre ou comme outil de savoirs, ou comme défi technique pour les start-up de demain, mais comme outil du vivre-ensemble. C’est une erreur de penser qu’Internet va de soi. Que c’est simple comme un clic. Nous sommes souvent victimes d’un contresens, aveuglés par les prouesses techniques de la nouvelle génération. On loue dans une sorte d’utopisme digital la Génération Z, ceux d’entre nous nés avec l’Internet et les réseaux sociaux comme s’ils étaient censés tout connaître du fonctionnement des réseaux. Et même si cela peut parfois être le cas, Internet ne se réduit pas à une affaire de technique et de connexion. Il manque souvent l’essentiel aux digital natives, à savoir la perspective. Celle qui peut faire qu’Internet et les réseaux sociaux constituent de véritables vecteurs de sociabilité et de vivre-ensemble, bref, de citoyenneté aujourd’hui.


UNE TOILE DE CODES

Ce travail de perspective relève du champ de l’éducation. Qu’est-ce que l’éducation sinon la mise en perspective des choses et des savoirs ? Un travail qui pourrait être entrepris selon deux axes complémentaires : l’étude des codes (sociaux) et la compréhension du code (numérique).

Par les codes sociaux, car il s’agit là d’une composante essentielle aujourd’hui. En tant qu’internautes, nous sommes tous co-constructeurs d’Internet, de même que nous sommes tous devenus, à notre corps défendant parfois, selon nos usages, des producteurs de contenu. Et à ce titre-là, il incombe à chacun d’en saisir pleinement les enjeux. Du savoir-vivre au savoir s’informer et informer.

Par le code numérique, car au-delà des interférences sociales entre personnes, il est vital de connaître, à l’heure des big data et des algorithmes, le fonctionnement d’Internet. C’est un des enseignements du livre de Dominique Cardon À quoi rêvent les algorithmes – Nos vies à l’heure des big data*. Il souligne que les algorithmes – dont il dénombre quatre familles – sont omniprésents sur Internet, que ce soit sur Google (dans nos boîtes mail, sur les réseaux sociaux, lors d’achats en ligne) ou de simples clics sur un statut. L’auteur ne crie pas à Big Brother comme certains. Ce qu’il montre, en revanche, c’est que les algorithmes ont tendance à nous cantonner dans nos propres choix. Et ainsi nous donnent l’impression de circuler libres dans la cage faite par nos propres choix. Ce que Cardon préconise, c’est « d’entrer dans la boîte noire » et de « passer en manuel », en comprenant et en analysant le fonctionnement des algorithmes afin de s’en libérer.

Comprendre les codes et le code, c’est ouvrir la voie à une nouvelle citoyenneté numérique. Et permettre à chacun d’utiliser l’outil formidable de libération qu’est Internet à sa juste mesure en faisant rimer responsabilité et liberté.

*Coll. « La république des idées », Le Seuil, 2015.
David Lacombled
Directeur délégué à la stratégie des contenus du Groupe Orange et Président de l'IAB. Auteur de Digital Citizen, il préside le think-tank La villa numeris.



Sur les réseaux, tout est affaire d’éthique personnelle en work-in-progress […] la citoyenneté est plus affaire d’esprit que de lettres
Illustrations de Laurent Duvoux











































L’EMPATHIE N’A PAS LA PRÉTENTION DE RÉSUMER L’ENGAGEMENT EN ENTIER

















































































PENSER CONTRÔLER ET SÉLECTIONNER CE QUI SE DIT OU S’ÉCRIT SUR INTERNET EST UTOPIQUE








































IL MANQUE SOUVENT L’ESSENTIEL AUX DIGITAL NATIVES, À SAVOIR LA PERSPECTIVE








































COMPRENDRE ET ANALYSER LE FONCTIONNEMENT DES ALGORITHMES AFIN DE S’EN LIBÉRER
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