SE DÉCENTRER C’EST SE RÉINVENTER
SÉBASTIEN BROCANDEL
Si les marques ont toujours gentiment convoité la jeunesse volatile, mais bankable, des 25-35 ans, la génération des millennials est singulièrement provocante. Elle a un temps d’avance. Elle incarne la culture numérique, qui n’est encore qu’un but pour elles… Empruntant aux sciences humaines, les agences leur suggèrent la décentration pour arriver à leur fin.
Légende : Qui mieux que Burger King pour illustrer cette notion de décantation ( Whopper Blackout / Buzzman )
 
Cible marketing privilégiée, la génération des millennials, curieuse, agile, à l’identité multifacette est largement étudiée et exploitée commercialement. L’une des raisons de cette attention particulière tient au fait qu’à partir de 25 ans, période du passage de la vie étudiante à la vie professionnelle, chacun accède à un pouvoir d’achat qui n’ira qu’en grandissant. L’enjeu est donc majeur de faire partie des marques qui cristallisent la relation du consommateur à son environnement. Ceci au moment de l’affirmation de soi dans le corps social et de l’affirmation de son pouvoir d’achat permettant de se situer sur l’échelle sociale.

Dès lors, de nombreuses marques envisagent prioritairement leur rapport à cette classe d’âge, et bien souvent le terme de « décentration » émerge tantôt dans le discours des directeurs marketing, des directeurs de la communication ou au sein des agences de communication.
L’ÈRE PUBLICITAIRE DES MARQUES ICÔNES DÉLIVRANT AU MONDE UN MESSAGE DESCENDANT, VOIRE CONDESCENDANT, EST RÉVOLUE.


La décentration, c’est regarder dans la même direction

Le parallèle est surprenant. Comment se fait-il que la terminologie « se décentrer », empruntée au champ des sciences humaines, s’applique dorénavant aux relations entre les marques et leurs consommateurs ? Pourquoi les agences incitent-elles les marques à se décentrer d’elles-mêmes pour entrer dans un nouveau mode relationnel à leurs consommateurs ?

Le terme de « décentration » est depuis longtemps utilisé en psychologie et en sciences humaines. Dit simplement, c’est la capacité d’adopter d’autres points de vue que le sien. En outre, ce mécanisme interne vise à échapper à une tendance égocentrée d’un individu ou sociocentrée à titre collectif. Il vise donc à échapper à une forme de subjectivité. Et quoi de plus subjectif qu’un message publicitaire ?

Changer de point de vue, c’est renoncer symboliquement et momentanément à sa propre vision des choses pour adopter celle d’autrui. C’est attribuer potentiellement au regard d’autrui sur le monde autant d’importance qu’à son propre regard. C’est raisonner par équivalence et considérer, par extension pour une marque, que le regard ou le discours d’un consommateur sur un objet peut avoir la même valeur que le sien.

Cette posture de marque plus humble et agile répond à une dynamique très actuelle. L’ère publicitaire des marques icônes délivrant au monde un message descendant et, devrait-on dire parfois condescendant, est révolue. Les millennials ont désormais des attentes relationnelles beaucoup plus fortes et qualifiées. Leur ouverture d’esprit tendant à une forme d’opportunisme dangereux pour les marques, car il leur est aussi facile de « liker » que de « zapper ». Pour les fidéliser, mieux vaut savoir s’ajuster.

L’intelligence publicitaire est relationnelle

Selon le chercheur suisse Jean Piaget, l’intelligence est la capacité de plus en plus diversifiée et complexe à mettre en œuvre des moyens et procédures pour atteindre des buts. Et des buts, les marques en ont ! Lorsqu’elles consultent des agences et souhaitent proposer un produit au terme de longues et coûteuses recherches en développement… vient alors le temps bien légitime de rentabiliser ses investissements, et l’urgence est souvent de mise.

L’intelligence publicitaire devient relationnelle. Elle réside alors dans l’orchestration des meilleurs stratégies et moyens pour satisfaire les objectifs de la marque tout en respectant les codes relationnels propres à nos digital natives.

Le rapport à l’autre prend maintenant tout son sens. D’où l’émergence d’un incontournable de toute stratégie de marque dorénavant : l’UGC (User Generated Content). Ce marqueur conversationnel est le critère garantissant l’écoute de sa communauté et le semblant de dialogue qu’il convient d’initier, puis entretenir. Chaque marque a son community manager (animateur de communauté en ligne) ou confie cette mission aux agences. Burger King l’a compris, et son retour en France en grande pompe s’est opéré avec une intelligence relationnelle très efficace. Ses opérations retentissantes sont pensées en amont avec une décentration au profit des digital natives. Tout est mis en œuvre pour être en phase avec eux, et la marque se distingue dans l’exploitation publicitaire par sa capacité à dialoguer, à réagir et à s’ajuster à l’autre.
DÉCLOISONNER LES RELATIONS ENTRE LES SERVICES DE COM’, MARKETING ET INFORMATIQUE AU PROFIT D’UNE AGILITÉ CONSTRUCTIVE.


La décentration devient agissante

Les millennials, nés avec un smartphone en guise de hochet sous une exposition aux messages publicitaires quasi permanente, ont intégré les mécaniques publicitaires. Ils en saisissent les tenants et les aboutissants. Au-delà de discuter sur ses réseaux sociaux, la marque se doit de partager un système de valeurs devenu consubstantiel à la qualité de la relation. L’engagement des marques sur des valeurs fortes (transparence, honnêteté, utilité…) devient un processus à long terme déterminant qui implique d’être en capacité de se remettre en question, de considérer l’autre et ses attentes. La décentration devient agissante. C’est par l’étude des consommateurs, par les orientations du planning stratégique des agences de communication, que les marques se questionnent et entament une réinvention signifiante. Pour engager ses consommateurs, littéralement les conduire dans une voie, une marque doit elle-même s’y engager. Elle participe au voyage, à l’aventure, se met en mouvement et s’ajuste à l’autre, sans faire les choses à moitié.

La réinvention passe par l’engagement

Rei, la marque américaine d’équipement outdoor, a fermé tous ses magasins le jour du Black Friday pour inciter à fuir le shopping et profiter de la nature. On imagine les débats en interne ! Afficher portes closes le jour de la plus grande affluence en magasin de l’année, c’est un engagement très concret (et médiatique) en résonance avec les aspirations de son public. Comme si Décathlon fermait le premier jour des soldes. Une opération à succès qui remet en question l’entreprise dans sa stratégie marketing et de communication.
LES MARQUES DOIVENT SE DÉCENTRER POUR MIEUX SE TRANSFORMER. EN SUBSTANCE : ÉVITER DE TROP SE REGARDER DANS LE MIROIR !


La marque Patagonia a réorienté depuis longtemps sa communication via son programme de brand content « Worn Wear » et son modèle économique en prônant le recyclage, la réutilisation, la réparation. Très impliquée socialement et très active en digital, elle s’est réinventée comme un ami plein de bon sens qui nous affirme : « If it’s broke, fix it ! » ou « Repair is a radical act ». Ou comment résoudre l’équation de la vente de ses produits quand on conseille de les acheter durables voire réparables… Les prises de risque de la marque lui sont bénéfiques, et sa communauté est devenue particulièrement fidèle et active.

Dans un autre registre, si Redbull, breuvage aux composants artificiels, connaît un tel succès médiatique, c’est qu’elle a construit une image sans artifice, simple, lisible, authentique. Elle s’est façonnée à l’image de ses consommateurs, traduisant sa capacité à adopter des points de vue externes. Résultat, l’amie Redbull s’entoure de gens à qui elle ressemble et qui par un savant jeu de miroirs, lui ressemblent.

Pour fédérer une jeunesse bankable et hyperactive, la marque et les individus qui la composent doivent se décentrer pour mieux se transformer. Se décentrer pour mieux s’ajuster aux attentes d’une classe d’âge opportuniste. Reconsidérer les rapports internes aux entreprises, décloisonner les relations entre les services de communication, du marketing et de l’informatique au profit d’une agilité constructive. Se remettre en question à titre individuel tant que structurel. Considérer l’autre. En substance, éviter de trop se regarder dans le miroir !
Sébastien Brocandel
Directeur général de Pschhh. Formé en neuropsychologie cognitive, il étudie l’émergence de la pensée avant d’inciter les marques à changer de point de vue pour mieux engager leurs publics.
 
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