La nouvelle Nouvelle Vague
Par David Batusanski
À la vitesse d’un cheval au galop, un nouveau mode d’expression et de production est en train d’envahir le paysage audiovisuel. Une nouvelle culture qui pourrait bien avoir l’effet d’une déferlante... —
Norman Thavaud dit Norman fait des vidéos




Ils sont des milliers
à sauter le pas.
Auteurs, réalisateurs,
producteurs,
se mettent en scène




































Illustrations d'Antoine Orand


































La révolution digitale
est en train de
terminer le travail
de la Nouvelle Vague


































Faire du cinéma
à l'heure du digital,
ça veut dire être
capable de fédérer
des communautés éclatées




































































L’accès à la technologie
ne fait pas le talent
Difficile de ne pas avoir entendu parler de Norman. Ou encore de Freddie W. Sur YouTube, l’un parle à sa webcam, l’autre en est à la deuxième saison de sa websérie financée à hauteur de plusieurs centaines de milliers de dollars, notamment par les fans. Ces deux nouveaux héraults des temps modernes font des millions de vues en parlant de jeux vidéos, de leur vie, en commentant notre époque ou en créant les programmes qu’ils auraient envie de voir.

Norman et Freddie W. sont les arbres qui cachent la forêt : comme eux, ils sont des milliers à sauter le pas. Ils sont auteurs, réalisa- teurs, producteurs, se mettent en scène. Bienvenue dans l'ère de la nouvelle Nouvelle Vague.


C’est l’histoire d’une vague...

Ce qui se passe sur les plateformes vidéos aujourd’hui procède des mêmes phénomènes qui ont été à l’origine de la sortie de plus de 160 premiers films en France entre la fin des années 50 et le début des années 60, en seulement en 4 ans ! Comparer les débuts de Rohmer, Chabrol, Truffaut ou encore Godard à ceux de Kriss Langue de Pub, de Faireset ou Aziatomik peut paraître particulièrement tiré par les cheveux de prime abord. Mais seulement de prime abord. Les facteurs de l’émergence des nouveaux créateurs sur le web sont similaires en tout point à ceux de la naissance de la Nouvelle Vague, qu’ils soient politiques, sociologiques, économiques ou technologiques.

Au sortir de la seconde guerre mondiale, les accords Blum-Byrnes prévoient notamment la fin de l'interdiction des films américains en échange d’un prêt à la France. Dans le même temps, pour atténuer l’effet de la déferlante des films américains sur le marché français, le gouvernement entérine la réglementation du secteur cinématographique commencée sous Vichy. Naissent l’Idhec (qui deviendra la Femis) et le CNC, qui délivrent label et carte professionnelle. Et surtout, c’est la mise en place dès 1946 d’une taxe sur la vente des billets pour financer la production française, toujours en cours aujourd’hui et que les Américains tentent de faire disparaître depuis, round de négociations après round de négociations.

Ainsi, la génération de Truffaut se rue dans les salles obscures pour découvrir le cinéma américain dont elle était privée depuis 1939. Véritable souffle d’air nouveau après les années du cinéma de l’occupation. Cette nouvelle génération a soif de nouveauté et le clame haut et fort dans les nombreuses revues spécialisées qui naissent aussi à cette époque.Truffaut et consorts en ont marre de nombreux cinéastes français établis et proposent une autre idée du cinéma. Le film est une œuvre et le réalisateur en est l’auteur.


La vague haut débit

La révolution digitale voit émerger une nouvelle génération de créateurs qui profitent eux aussi d'une révolution technologique qui leur permet à leur tour de battre en brèche l'ordre établi... Grâce à l'accès direct à leur public, et ne s'embarrassant pas de contraintes dont ils n'ont souvent même pas conscience, ils créent du contenu à succès que les acteurs historiques (de la TV, du cinéma, de la musique...) ont vu arriver sans véritablement les comprendre. Jamais, au cours de ces 60 dernières années, la manière de faire du cinéma ou de créer du contenu n'a été autant bouleversée.


La barrière de la diffusion tombe

La révolution digitale est en train de terminer le travail de la Nouvelle Vague. Elle fait complètement tomber la dernière barrière de la chaîne de production, celle de la diffusion. Des milliers de créateurs rassemblent chaque jour des millions d’internautes devant des contenus plus ou moins élaborés. Là où la génération Truffaut devait encore trouver un distributeur pour ses films, qui lui-même devait négocier des écrans avec les exploitants, l’arrivée des plateformes vidéos permet à tous de diffuser ce qu’il souhaite. Et cela donne - un exemple parmi tant d’autre - « The shadow of revenge », un fan-film qui raconte une nouvelle aventure de James Bond et qui cumule 2 millions de vues sur YouTube (c’est-à-dire l’équivalent d’un beau succès en salle pour un film français).



Plus encore : alors que l’esprit de la Nouvelle Vague a mis un certain temps à se diffuser à travers le monde, aujourd'hui, la double révolution technologique et des usages est à la fois immédiate, mondiale et quasi gratuite !


Fédérer des communautés éclatées

L’abaissement drastique des coûts de diffusion a rendu gratuit l’accès au contenu. Or, comme leurs aînés de la Nouvelle Vague, les YouTubers et autres MotionMakers ont besoin de plus de moyens s’ils veulent pouvoir proposer autre chose que des journaux intimes auto-filmés dans leur chambre. La volonté d'offrir des histoires mieux écrites, mieux mises en scène, en un mot mieux produites oblige donc à repenser tout le système que l'on a connu jusqu’à présent. Faire du cinéma à l'heure du digital, ça veut dire être capable de fédérer des communautés éclatées autour d’un projet pour lequel, d’une manière ou d’une autre, elles sont prêtes à payer. Si ces communautés ne payent pas pour y avoir accès,, il faut qu’elles payent plus en amont de la chaîne. Et ce prix, c’est celui de la publicité.


Un modèle économique vague ?

En France, in fine, les programmes (TV et ciné) sont financés par les marques ! À travers les rouages du CNC et des obligations légales des chaînes de TV françaises, c’est grâce aux revenus générés par l’achat d’espace publicitaire que le système financier si complexe de l’audiovisuel français existe. Et à l’heure d’Internet, le raccourcissement de cette chaîne de valeur est inéluctable. Logiquement, avec ce nouveau modèle, les marques deviennent plus directement productrices des contenus. Plus que sur n’importe quel autre média, sur le web, l’internaute est toujours simultanément public et consommateur. Les marques (re)découvrent le besoin impérieux de construire une relation directe avec le public sans l’intermédiation des programmes TV. Exemple éloquent : la marque de Whisky Jameson s’est associée à Kevin Spacey pour pour mettre le pied à l’étrier de jeunes cinéastes. À la clef, le financement du court métrage des lauréats. L’année dernière, les candidats devaient écrire un script pour l’acteur Willem Dafoe ! Et sans obligation de mention directe ou indirecte de Jameson. Il y a pire comme manière de débuter dans ce métier...




L’exception culturelle est obligée d’évoluer

Dans ce contexte, le système français de l’exception culturelle ne pourra pas tenir face à l’ampleur du phénomène web. C’est bien la nouvelle génération de créateurs qui joue ici son avenir. Prenant ses origines au même moment que la Nouvelle Vague, l’exception culturelle est obligée d’évoluer. Ce ne sont ni le CNC ou la SACD qui accompagneront de manière pérenne ces nouvelles formes de création, quoi que ces institutions en disent. Elles sont non seulement complètement dépassées par l’ampleur des événements, mais en plus elles ne sont pas organisées pour saisir rapidement les changements qui s’imposent dans leur mission. Pendant ce temps, se dressent devant nous de nouveaux géants bien plus puissants que les studios de cinéma d’autrefois ou que les groupes médias d’aujourd’hui. Certains l’ont bien compris et les alliances entre géants de l’ancien temps et du nouveau sont en train de redessiner le paysage audiovisuel. Et pour longtemps ! Canal Plus a pris une participation dans Makers Studios, un studio nouvelle génération 100% digital. M6 a créé Golden Moustache, une chaîne YouTube pour continuer de capter l’attention du jeune public qui ne regarde plus la TV comme ses aînés !

La nouvelle Nouvelle Vague n’attend personne. C’est elle l’air du temps ! Ce sont les nouveaux créateurs qui répondent aux envies du public, qui est à la fois un consommateur, un cinéphile, un citoyen. Tout n’est qu'un éternel recommencement : il y a beaucoup d’appelés et très peu d’élus parce que l’accès à la technologie ou à un public ne fait pas le talent et n’exempte pas de travail. Qu’il s’agisse d’une vidéo sur Dailymotion ou d’un long métrage, un succès, c’est trois choses : une bonne histoire, une bonne histoire et une bonne histoire.

david batusanski
Avec une expérience de prod TV et cinéma, en charge des acquisitions de droits d’éditions vidéos, de suivi de production, il bifurque vers la publicité comme TV producer. En 2012, il co-fonde trajectoi.re, une agence de créateurs vidéo.
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