2030, La ville faite pour les marques ou les marques faites pour la ville ?
Quelle empreinte RSE les marques doivent-elles laisser dans une agglomération ? Devant un lâcher prise des pouvoirs publics sur les politiques sociales et urbaines, elles ont un rôle à jouer et pourraient fortement se substituer aux autorités... Mais comment, quand et sous quelle forme ? Découvrez deux visions anticipatrices et différentes. —
ILLUSTRATIONS
d'Amélie Carpentier






























Grâce à un investissement
de Nike,
les rues du centre
de son quartier
sont toutes piétonnes
























































































































La vie du consommateur est devenue un long fleuve tranquille

Par claire bourasset & Aurélia Cocheteux


Il est 8h30, Zoé franchit la porte de son appartement et part travailler. En descendant les escaliers, elle croise Ben, le concierge alimentaire Biocoop. Un contrat a été signé entre l’entreprise et la copropriété pour que ce dernier entretienne le jardin sur le toit de l’immeuble et revende ensuite les fruits et légumes dans un local au rez-de-chaussée. Elle le salue et lui rappelle qu’elle viendra récupérer son panier tout à l’heure. Grâce à un investissement de Nike, les rues du centre de son quartier sont toutes piétonnes. Aussi, aussitôt sortie, Zoé choisit, elle, d’enfiler ses baskets pour un petit footing et emprunte le sentier arboré entretenu par Jardiland.

Après trente minutes à peine, elle arrive au « Living Center » de son quartier. Ce grand immeuble offre des espaces de vie sociale aux habitants des alentours. C’est un lieu de rencontre et de convivialité où l’on retrouve ses voisins. Rejoignant les locaux de télétravail équipés et gérés par LinkedIn, elle passe devant les salles associatives créées par le Crédit Coopératif et décide de s’inscrire à un cours de dessin donné dans l’une des salles dédiées aux activités créatives et culturelles mises en place par Loisirs et Création. Grâce aux investissements des marques, des activités autrefois réservées aux plus aisés sont aujourd’hui ouvertes à tous.

Installée confortablement à son bureau, la matinée de travail de Zoé, qui officie comme Living Brands Developer, peut maintenant commencer. En 15 ans, son travail a bien évolué : les campagnes publicitaires invasives sont devenues obsolètes et les marques ont décidé d’investir ce budget dans le développement de services gratuits et utiles à la communauté participant à la définition de leur identité. La consommation participe désormais à un cercle vertueux, une partie des bénéfices réalisés par la marque étant réinvestie dans ces services qui améliorent le quotidien des citoyens et que Zoé aide donc à définir.

En sortant du travail à 13h, elle file vers son immeuble récupérer son panier Biocoop avant de rejoindre son restaurant collaboratif préféré géré par Maggi. Là-bas, elle cuisine avec ses amies les ingrédients de son panier, puis partage un déjeuner convivial. Rassasiée, Zoé s’offre un moment de détente en rejoignant ravie l’une des « aires de rien » mises à disposition par Bouygues Construction et Coca Cola. Souhaitant développer des espaces d’épanouissement et d’harmonie dans la ville, ces marques se sont associées pour laisser la nature reprendre ses droits ça et là dans les quartiers.

En pianotant sur son smartphone, Zoé découvre alors que son auteur préféré présentera dans quelques minutes son dernier livre au Hachette Starbucks Coffee du coin et décide d’y faire un saut. Chaque Starbucks a désormais un thème et le quartier a pu voter en ligne pour choisir quel serait le sien. Chaque Café collabore ensuite avec d’autres marques afin de proposer des ateliers et soirées. Avant de quitter le Starbucks, Zoé calcule, grâce à l’appli IBM, le moyen de transport le plus rapide pour se rendre au hackaton organisé par la SNCF pour la refonte de son site Internet. Associée à JCDecaux (Vélib’), Blablacar et la RATP, entre autres, l’appli lui permet de repérer une voiture de particulier qui va justement dans la même direction et inscrite sur le site de covoiturage. 5 minutes plus tard, elle est partie.

Après l’événement, Zoé choisit de rentrer à pied grâce aux passerelles touristiques mises en place par Mappy et Google survolant les différents quartiers. Elle enfile ses Google Contacts et découvre l’histoire des bâtiments devant lesquels elle passe en fixant simplement plus de 3 secondes des marqueurs fixés aux murs. Sur le chemin du retour, elle passe enfin faire quelques courses à l’« Exchange Center » de son quartier. Ancienne grande surface, on y trouve maintenant un ensemble de coopératives et un centre de troc géré par eBay.

La civilisation moderne génère souvent mal être profond et individualisme, il est temps de revenir à un modèle qui s’attache « à régénérer les cités, à réanimer les solidarités, à susciter ou ressusciter des convivialités, à régénérer l'éducation » selon les mots mêmes d’Edgar Morin. Les citoyens ont d’ores et déjà lancé le mouvement (Fablabs, AMAP, monnaies locales...) et il ne tient qu’aux marques de s’en saisir pour offrir de véritables services permettant l’amélioration des conditions de vie quotidiennes des habitants. Elles y retrouveront leurs lettres de noblesse, une réelle utilité et surtout l’adhésion de leurs publics.



2030, le danger d’une ville « native advertising »

Par Laura Chatain


En 2030, les démarches de RSE sont devenues indispensables pour assurer la pérennité de son entreprise : garantir l'offre, mais aussi la demande consommateur.

Les actions « responsables » se multiplient : combattre la pauvreté ou la solitude ; la malnutrition ou l'obésité ; la discrimination ou le manque d'estime de soi ; le mal logement ou l'accès à la culture... Ces engagements se doivent d'être visibles et - dans un contexte d'espace médiatique saturé - il faut savoir parler à ses publics différemment. Et qu'y a-t-il de mieux que la vraie vie pour toucher ses publics, leur faire vivre une expérience et créer un engagement durable ? La ville est ainsi devenue le terrain de jeu des marques à travers le monde.

Améliorer le quotidien à travers des équipements, des expériences

Dans les pays en voie de développement, on est très tôt exposés aux marques engagées grâce aux campagnes de vaccins Pampers, aux programmes d'éducation à l'hygiène « C'est sain c'est Sanex », ou pour la nutrition Kellogg's. Les enfants des communautés rurales se font soigner dans les dispensaires Ajax, vont à l'école Dora l'exploratrice, et jouent dans les parcs de récréation upcyclés Coca-Cola.

Dans les villes, les quartiers sont littéralement des « territoires de marques », ceux des bienfaitrices qui se sont engagées pour rénover l'outil de production et créer des débouchés commerciaux. L'ex quartier des tanneurs est ainsi devenu le quartier Cuir Center ; celui des épices, c'est le quartier Ducros. Les échoppes sont aux couleurs selon leur sponsor majeur : la masse jaune au loin indique un salon de thé Lipton, celle qui est violette est spécialisée en Cream Soda, et la rouge, vous savez bien ce qu'elle vend...

Les lieux clés de la ville ont aussi été préemptés par les marques. On se balade sur le front de mer Stérimar : des nouveaux bancs y ont été installés avec des brumisateurs marins (il paraît que rester 5 min par jour là-bas permet de prévenir le rhume). Celui de Narta, plus au nord, est plus frais (suivre les panneaux Nokia pour s'y rendre). On peut s'y divertir en faisant un tour en bateau Findus : des parties de pêche responsables où on apprend à reconnaître les différents poissons. Si l'on souhaite profiter d'un moment plus romantique, on opte pour le tour Eau Jeune. Selon le bateau choisi, la promenade sera torride ou sucrée.

« Plus qu'une expérience à partager, du coaching de vie »

Dans les pays développés, les marques ont aussi beaucoup œuvré pour impacter positivement notre société. Toujours avec le souci d'être au plus proche de son consommateur, de créer une relation qui dépasse le produit ou service en lui-même. La marque ne fournit plus seulement des expériences, elle partage des moments de vie avec son consommateur.

La ville s'est transformée en une foire permanente : pop-ups stores, centres éphémères, mobilier urbain expérientiel, billboards trompe l'œil, vitrines interactives, drones... Pousser du contenu de marque interactif, expérientiel et personnalisé est désormais le nerf de la guerre. Le native advertising s'est extirpé du Web pour apparaître dans la vraie vie : la « sponsor-mation » est contextualisée par quartier, par moment de la journée, et bien sûr par cible (la reconnaissance faciale est maintenant hyper au point).

Les marques sont ainsi presque devenues des coachs de vie. Telle marque de shampoing antipelliculaire me suggère des stages de théâtre « parce que l'essentiel, c'est d'avoir confiance en soi », telle banque propose des blind date pour ses clients car « qui vous connaît mieux que nous ? », telle marque de mousse à raser organise des cours de close combat « pour se protéger de toutes les agressions », etc.

Le temps de transport n'est plus un temps mort. Désormais, c'est un moment privilégié qui peut être dédié à la pause (optez pour la rame Dunlopillo), à l'intendance de la maison (empruntez le couloir U, et flashez) ou aux loisirs (accès direct pour le stade O2 Arena, voir jouer Emirates Paris, ou le Mondelez Mall pour grignoter un morceau). Des espaces de vie ont été aménagés pour partager un moment entre amis et ainsi lutter contre l'individualisme morose qui caractérisait les transports il y a peu. Chez soi, la brand expérience continue...

La ville est devenue une expérience publicitaire 360° où chaque aspect de la vie d'un consommateur est abordé. Il y avait « une application pour ça », désormais il y a une marque pour ça. À force de vouloir gérer son impact sur la société, les marques ont franchi une ligne blanche et se sont immiscées dans la vie personnelle des consommateurs, brouillant les pistes entre parcours d'achat et parcours de vie.

C'est la rareté qui crée de la valeur. Ne faudrait-il pas limiter les prises de parole de marque, et faire de celles qui existent de vraies expériences ? Mettre en place des moments où le consommateur enfile alors volontairement et avec délectation sa casquette de shopper pour rentrer dans l'histoire et l'expérience que la marque voudra lui offrir.

Laissons plutôt la ville de demain à la marque-ville ! Chacun doit connaître son terrain de jeu et se concentrer sur son cœur de métier. Les enjeux de la ville appartiennent aux citoyens plutôt qu'aux consommateurs...
LaurE Chatain
Claire Bourasset
Aurélia Cocheteux
Globetrotteuses invétérées, passionnées par la culture et les tendances de société, accros aux sujets de responsabilité et prospective, ces conspiratrices positives de l'agence Pixelis s'attachent à poser un œil critique sur tout ce qui les entoure pour repenser le rôle des marques et faire en sorte qu’elles contribuent à un monde meilleur…rien que ça !









































Mises en place par Mappy
et Google, des passerelles
touristiques survolent
les différents quartiers




























En 15 ans
les campagnes
publicitaires
invasives
sont devenues
obsolètes

































































































La ville est devenue
une foire permanente : 
pop-ups stores, centres
éphémères, mobilier
urbain expérientiel
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