Jeunes et moins jeunes : mêmes combats ?
isabelle musnik
Illustrations • Inkie
Après la lutte des classes, le clash des civilisations, le conflit des sexes… la guerre des générations ? Enfants contre parents, jeunes pauvres contre vieux riches, actifs contre inactifs, digital natives contre zombies du livre, modernes contre ringards. Voilà la guerre qu’on nous annonce trop souvent pour les temps à venir.
 
Et si celle-ci n’avait pas lieu ? Et si le lien intergénérationnel se renforçait ? « Jeunes et vieux ne sont pas toujours opposés ou indifférents les uns aux autres. Nous croyons vivre la guerre des générations, alors que nous avons la paix des âges », assure le sociologue Serge Guérin1. Un constat finalement pas si éloigné de celui du regretté Pierre Desproges, qui ironisait : « Il est de fait que les vieux cons, comme vous dites, sont d’anciens jeunes cons restés fidèles aux mêmes valeurs sacrées de la condition humaine qui s’accommodent aussi bien de la banane sur l’œil à 18 ans que de la casquette Ricard à 50. »2



Nous avons donc voulu comprendre les attentes et les visions réciproques des 18-34 ans et 35-64 ans, ainsi que sur leurs pairs et le monde qui les entoure. L’agence d’études Iligo3 s’est fait le relais de nos interrogations et voici ce qui nous est revenu.

La fierté en partage

Première constatation : leurs évaluations personnelles sont assez proches. Tous se considèrent « volontaires » (95 % pour les 18-34 et 93 % pour les 35-64), « autonomes » (94 % et 96 %), « à l’écoute des autres » (92 % et 95 %), dynamiques (90 %), « épanouis » (83 % et 84 %). Ils se jugent aussi « généreux » (89 % et 91 %), « ambitieux » (86 % et 79 %), « optimistes » et « épanouis » (83 %), « impliqués dans la société » (80 % et 81 %), individualistes (57 % et 51 %). La seule différence notable – et logique – est le critère « durs » (violents/ agressifs) », significativement plus cité par les 18-34 ans (32 %) que chez les plus âgés (22 %).

Des individus en contradiction avec leur génération

Deuxième constat : lorsque l’on compare l’évaluation personnelle et globale des générations, on observe les mêmes tendances entre les 18-34 ans et les 35-64 ans. « L’évaluation personnelle est dans les deux cas plus positive que l’évaluation globale de la génération », commente Olivier Goulet, président fondateur d’Iligo. Ainsi, alors que 83 % des 18-34 ans s’estiment personnellement « épanouis » et « optimistes », ils ne sont que 78 % à affirmer que leur génération est épanouie, et seulement 77 % qu’elle est optimiste. La différence est encore plus grande sur les items « à l’écoute des autres » (92 % vs 76 %), « volontaires » (95 % vs 80 %) et autonomes (94 % vs 80 %).



« De même, les critères négatifs ressortent plus dans l’évaluation globale que personnelle », ajoute l’analyste. Ainsi, seuls 31 % des jeunes se trouvent ennuyeux, alors que 53 % estiment que leurs pairs sont ennuyeux. Mêmes réactions pour l’item « individualistes » (57 % vs 80 %), « durs » (32 % vs 71 %) et « angoissés » (70 % vs 79 %).

Quant aux 35-64 ans, chacun se considère également personnellement « plus optimiste, plus généreux, plus à l’écoute des autres, plus volontaire et plus autonome » que toute sa génération. Mais ils jugent toutefois celle-ci comme plus ambitieuse et plus impliquée dans la société qu’ils ne le sont eux-mêmes.

Alors que 83% des 18-34 ans s’estiment personnellement « épanouis », ils ne sont que 78% à affirmer que leur génération l’est.


Une vision négative des aînés

Troisième observation : lorsqu’il s’agit d’évaluer leur génération, les 18-34 ans se jugent plus positivement que les 35-64 ans sur tous les critères. 78 % des jeunes se voient ainsi « épanouis » (contre 72 % seulement chez leurs aînés), 87 % se considèrent « dynamiques » (77 % ), 77 % « optimistes » (70 %), 74 % « généreux » (65 %), 85 % « ambitieux » (80 %), 76 % « à l’écoute des autres » (60 %).

Ils sont 84 % à s’estimer également « volontaires » (74 %), 80 % « autonomes » (66 %) et 77 % « impliqués dans la vie » (66 %). « Ce ne sont que sur les critères négatifs que les plus jeunes et leurs aînés s’accordent, notamment sur le fait que la génération 18-34 ans est dure et stressée », déplore Olivier Goulet…

Quelle était belle ma jeunesse...

Alors, finalement, les 18-34 et les 35-64 ont-ils une bonne image de leur jeunesse ? Eh bien, oui. « Les deux générations notent très positivement leur jeunesse, avec des scores respectifs de 86 % et 83 %. Les 35-64 ans attribuent toutefois plus de notes entre 8 et 10 à cet item : 46 % vs 39 % pour les 18-34 ans », explique Olivier Goulet. Une différence qui peut s’expliquer par le fait que les 18-34 ans jugent leur jeunesse plus rude que celle de leurs parents. Ce clivage s’observe sur tous les critères mesurés pour au moins la moitié des interviewés : professionnel (72 %), financier (67 %), humain/sociétal (62 %), sentimental (55 %) et même familial (49 %).




Des générations voulant changer les choses

En ce qui concerne leur vision globale du monde, on observe un pessimisme général et une certaine impuissance, même si, comme le note l’étude, « les 18-34 ans se détachent et obtiennent les meilleurs scores sur les items positifs tels que l’espoir, la confiance et la joie », poursuit Olivier Goulet. Stefan Zweig analysait déjà en 1926 (il avait 45 ans cette année-là) cette jeunesse pleine de paradoxes, mais aussi d’espoir : « Étant elle-même beauté, la jeunesse n’a pas besoin de sérénité : dans l’excès de ses forces vives, elle aspire au tragique, et dans sa naïveté, elle se laisse volontiers vampiriser par la mélancolie. »4

Tout n’est donc pas perdu, notamment lorsqu’on interroge jeunes et moins jeunes sur les questions actuelles, tous estimant que leur avenir est surtout entre leurs mains. Concernant les différentes problématiques mondiales, les 18-34 ans et les 35-64 ans reconnaissent qu’ils ont surtout confiance en leur génération pour répondre aux enjeux aussi bien écologiques, humanitaires, qu’économiques et politiques. Deux communautés d’âge qui n’en sont pas moins lucides, dressant du monde qui les entoure un portrait assez conforme à la réalité des statistiques et qui se sentent fortement affectées par l’actualité perturbée du monde (attentats, montée de l’intolérance, mouvements migratoires et conflits religieux). « Une volonté d’agir et de changer les choses est très clairement lisible, même si elle a du mal à se matérialiser dans les faits… jusqu’à maintenant », constate Olivier Goulet.

1. La guerre des générations aura-t-elle lieu ? Serge Guérin, Calmann-Lévy, 2017.
2. Chroniques de la haine ordinaire, Pierre Desproges, Seuil, 1987.
3. D’après un panel de 500 personnes. Enquête réalisée en novembre 2018. Méthode CAWI (par internet). Individus de 18 à 64 ans représentatifs de la population française.
4. La Confusion des sentiments, Stefan Zweig, 1926.
Isabelle Musnik
Directrice des contenus et de la rédaction
 
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