À la télé, la fin du match est loin d’être sifflée
christine monfort
© Izuddin Helmi Adnan
Sport populaire par excellence, le ballon rond est au centre d’intérêts financiers gigantesques. Même stratosphériques, les droits télévisés restent la visée de tous. De nouveaux acteurs, issus du numérique, provoquent les acteurs traditionnels, qui oscillent entre attaque et stratégie de défense. Les évolutions en cours pourraient laisser entrevoir une véritable révolution.
 
Les rebondissements ne se déroulent pas seulement sur le terrain ! Les appels d’offres pour les droits télévisés du foot aussi sont forts en suspense, bluff, surprises, gagnants qui célèbrent leur victoire et perdants qui tentent de faire bonne figure. En mai 2018, la Ligue de football professionnel (LFP) a attribué, à la sidération générale, les droits de la Ligue 1 à Mediapro, grand manitou du foot ibérique, au nez et à la barbe de Canal+ (diffuseur historique du foot français depuis 1984), laissé KO debout après avoir été déjà bien attaqué par Altice pour RMC Sport…

Le groupe catalan, passé quelques mois plus tôt sous pavillon chinois, a littéralement tué le match et remporté la quasi-intégralité de la mise (8 matchs sur 10). Pour entrer sur le marché français, il a mis sur la table 1,15 Md€ par saison (60 % de plus que les droits 2016-2020). La somme avait en effet de quoi satisfaire la LFP, qui s’attache à réduire l’écart des droits français avec ceux des grands championnats européens ! « Les droits du foot sont très convoités et de plus en plus chers. Entre la compétition que se livrent les chaînes et les acteurs du digital, et l’arrivée de nouveaux entrants, on n’est peut-être pas au cœur d’une révolution, mais tout au moins d’une évolution », observe Vincent Chupin, consultant en droits télé et marketing sportif. Sur ce marché hautement concurrentiel, où il faut essayer de rafler des exclusivités, chaque époque a vu arriver ses nouveaux entrants : TPS, Orange, beIN Sports, Altice… Inflation mise à part, les gros transferts sont longtemps restés le fait d’acteurs de la télé payante, français ou étrangers, forcément richement dotés.

Un groupe catalan quasi inconnu ici, passé sous pavillon chinois, a remporté l’essentiel de la Ligue 1 française.


La Terre, ronde comme un ballon de foot

Après les Qataris de beIN Sports, les Chinois sont passés à l’offensive à partir de 2015, rachetant des sociétés de marketing sportif (Infront Sports & Media), des détenteurs de droits (Mediapro) ou en investissant dans des clubs européens : Slavia Prague, Inter de Milan, Aston Villa, Espanyol Barcelone… En France, Sochaux, Nice, l’OL et l’AJ Auxerre comptent des capitaux chinois. Plusieurs championnats européens (LaLiga Santander espagnole, la Premier League anglaise…) ont pris l’habitude de déplacer des matchs pour que les horaires soient compatibles avec une diffusion en Asie. Un Nice-PSG, programmé un dimanche à 13 h, a ainsi pu être suivi par 1,6 million de Chinois en mars 2018. La Coupe du monde 2022 ayant été attribuée au Qatar, c’est la compétition entière qu’il a fallu déplacer en plein hiver – au milieu des cham­pionnats nationaux et inter­nationaux – pour des raisons climatiques.

Les ayants droit lorgnent aussi sur le marché indien. Avec l’aide de BKT, fabricant de pneus indien devenu, en 2018, sponsor de la Coupe de la Ligue pour six saisons, la LFP espère faire connaître la L1 auprès des diffuseurs de ce pays. L’international est plus que jamais un axe de développement : « Une cinquantaine de personnes représentent LaLiga dans le monde. En 2017, la LFP et la Fédération française de foot (FFF) ont ouvert un bureau de représentation en Chine pour gagner des marchés et développer l’expertise française dans ce pays », rappelle Magali Tézenas de Montcel, déléguée générale de Sporsora, l’association interprofessionnelle des acteurs de l’économie du sport au service de l’intérêt général.

Pour l’instant, les réseaux sociaux et les géants du numérique sont restés hors du jeu hexagonal, mais ils pourraient eux aussi trouver des brèches. « Il y a trois ou quatre ans, on pensait que les réseaux sociaux ou les plateformes Over the top (OTT) auraient une stratégie mondiale. On se rend compte qu’ils achètent plutôt les droits pays par pays. En France, ils sont trop chers pour que les réseaux sociaux puissent refinancer leur acquisition par la publicité », analyse Vincent Chupin. Ces acteurs peuvent en revanche contribuer au rayonnement du foot français. La LFP a noué un partenariat avec la plateforme de streaming DAZN – le « Netflix du sport » – pour diffuser la L1 au Brésil jusqu’en 2021. « DAZN travaille les produits, crée de la curiosité et une culture autour des championnats. Elle le fait au Canada avec le championnat espagnol, qui n’aurait intéressé aucune chaîne ou plateforme locale payante », poursuit-il.

Les détenteurs de droits cherchent à se distribuer eux-mêmes et lancent des chaînes OTT.


Un périmètre de terrain à lignes variables

Une évolution plus radicale se profile depuis que les diffuseurs et détenteurs de droits cherchent à se distribuer eux-mêmes grâce à des offres OTT. Tant qu’elles resteront complémentaires du linéaire, elles permettront de développer les abonnements. À terme, les revenus de ces plateformes pourraient se substituer aux droits TV. « Les ayants droit vont calculer ce qui sera plus rentable pour eux. Sur les grandes compétitions de foot, on peut imaginer que cela va beaucoup changer », estime Pascal Crifo, CEO de Publicis Sport. Les pionniers doivent ménager les deux univers. La chaîne OTT de l’UEFA, lancée en juin 2019, diffuse des matchs féminins et de jeunes, mais attendra l’expiration des droits actuels, en 2021, pour proposer les matchs masculins de haut niveau. La Ligue de foot pro annonce une version aboutie de sa chaîne OTT pour l’été 2019. Elle sera, dans un premier temps, destinée à l’étranger, pour ne pas faire d’ombre aux broadcasters français.

Ayants droit et diffuseurs doivent s’adapter à l’évolution des usages et des attentes, notamment chez les jeunes générations. Ils pourraient s’inspirer de pratiques qui existent déjà dans d’autres sports. « Une partie du public n’a plus forcément envie de regarder un match de deux heures en direct. Aux États-Unis, une rencontre de la NBA dure trois bonnes heures, mais si on veut payer pour un match, on peut n’acheter que le dernier quart d’heure », note Vincent Chupin. Compléments d’information, data et storytelling sont bien adaptés à des consommations courtes. Netflix propose de son côté de plus en plus de contenus sur le sport, à l’image de son documentaire Antoine Griezmann, The Making of a Legend. « C’est une évolution à surveiller, comme l’éditorialisation que l’on peut proposer sur ce qui s’est passé à côté, avant, pendant et après un événement sportif. Les acteurs traditionnels du sport ne doivent pas se laisser dépasser sur une matière qui monte en puissance à côté du live, alors qu’ils ont des heures d’images et des contacts à exploiter », fait valoir Magali Tézenas du Montcel.

Un partenariat dans le foot doit être envisagé comme un asset stratégique pour la marque.


Un jeu de tactique

Par la qualité du spectacle, les audiences télé et les reprises médias générées, le football est très recherché des annonceurs. L’atomisation des droits n’est pas non plus sans conséquence : « Il y a plus de possibilités pour s’associer à un plan média, chez les grands partenaires du foot comme pour les marques, avec des stratégies plus tactiques. Il est aussi plus difficile d’émerger et, à la télé, les campagnes sont plus compliquées à orchestrer », reconnaît Pascal Crifo. L’efficacité vient plus que jamais de la combinaison entre l’idée créative et la diffusion de la campagne. « Un partenariat dans le foot doit être envisagé comme un asset stratégique pour la marque, poursuit-il. On ne peut plus se contenter d’associer deux logos. Il faut aussi activer les campagnes localement, dans les stades ou avec les joueurs d’un club… Le maillage territorial du foot est très intéressant pour les annonceurs à réseau. »

Communiquer autour du foot amène à composer avec plusieurs contraintes. Devenir partenaire d’une compétition n’ouvre pas le droit de s’associer à un de ses clubs, ni un joueur. Le droit à l’image collective oblige à montrer plusieurs joueurs ensemble… Plusieurs marques ont apposé leur nom à une compétition (Ligue 1 Conforama, Domino’s Ligue 2…) ou un stade (Matmut Atlantique à Bordeaux, Groupama Stadium à Lyon, Allianz Riviera à Nice). « Il y a toujours plus de risque à devenir sponsor d’un athlète ou d’une équipe que d’une compétition. Ces associations sont aussi intéressantes pour travailler la marque employeur et la motivation des collaborateurs », fait valoir Magali Tézenas du Montcel. Ou porter des valeurs d’égalité avec le foot féminin, en plein essor médiatique !


© David Pisnoy


Où voir les matchs ?


Les acteurs du payant




l’outsider qui prépare une chaîne 100 % foot

Ligue 1 sur la période 2020-2024 (matchs dimanche et vendredi à 21 h, du samedi à 17 h) partagée avec beIN Sports. Ligue 2 partagée avec beIN Sports (2020-2024).



Challenger toujours en embuscade avec le bouquet RMC Sport

Ligue des champions en intégralité et en exclusivité (2018-2021). Ligue Europa en intégralité (2018-2021). Certains matchs en clair sur RMC Story. Supercoupe UEFA (2018-2021).
Premier League anglaise en exclusivité (2016-2019). et accord avec Canal+ pour la période 2019-2022. Liga NOS portugaise en exclusivité (2016- 2020).



Vitrine qatarie sur le marché français

Ligue 1 en intégralité (dont 7 matchs en exclu). Ligue 2 en intégralité.
Championnats étrangers en exclusivité : LaLiga Santander (Espagne) et Serie A (Italie) jusqu’en 2021, Bundesliga (Allemagne), SüperLig (Turquie), Emirates FA Club, EFL Cup et EFL Championship (Royaume-Uni), Copa América (Brésil), Coupe d’Afrique des Nations. Orange e-Ligue 1. Coupe du monde 2022 (avec TF1).



ancien leader bousculé, en quête de remontada

Ligue 1 (3 matchs jusqu’en 2020), partagée avec beIN Sports. Ligue 2 (1 match jusqu’en 2020), partagée avec beIN Sports. Coupe de la Ligue en intégralité, co-diffusée par France Télévisions. Championnat de France (1 match).
Championnats étrangers en intégralité : Premier League anglaise (2019-2022, sous-licenciée à RMC Sport), Eredivisie (Pays-Bas), Jupiter Pro (Belgique), Scottish PPL (Écosse). Coupe du monde féminine en intégralité (sous-licence à TF1). Coupe du monde masculine U20, U17 et beach soccer en intégralité. Équipe de France espoirs en intégralité. D1 féminine diffusée en intégralité. Women’s Champions League (intégralité des matchs de l’OL).



La chaîne sport passée sous pavillon américain (Discovery)

Coupe de France en intégralité (certains matchs co-diffusés avec France Télévisions). Coupe de France féminine.

Le foot en clair



Coupe du monde de foot féminin 2019 (avec Canal+). Coupe du monde de foot masculin 2022 (avec beIN Sports). Matchs de l’Équipe de France (2018-2022) avec M6. Ligue des nations (premier choix avec M6).

Matchs de l’Équipe de France (2018-2022) avec TF1. Ligue des nations (premier choix avec TF1). Matchs de qualification de l’Euro 2020 et de la Coupe du monde 2022. Équipe de France féminine de football (2018-2023). Championnat d’Europe de football espoirs 2019 (Under 21 Championship).

Coupe de France de football dès les 32es de finale jusqu’en 2022 (7e ou 8e tour en décrochage régional). Coupe de France féminine de football (la finale jusqu’en 2022). Coupe de la Gambardella U18 (la finale jusqu’en 2022). Coupe de la Ligue jusqu’en 2020.

Ligue des Nations. Diffusion des matchs de qualification de l’Euro 2020 et du Mondial 2022 (en différé pour l’Équipe de France).

Encore au bord du terrain 

Les ligues et les fédérations qui affinent leurs offres OTT. DAZN, le Netflix du sport. Les GAFA : Facebook a noué, en 2018, plusieurs accords pour diffuser la Liga espagnole en Asie du Sud, la Ligue des champions et la Ligue Europa en Amérique du Sud, et les matchs de la Copa Libertadores.
christine monfort
Journaliste INfluencia
 
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