10 octobre 2019

Temps de lecture : 3 min

Conscious luxury ou les paradoxes du luxe éthique

Lors de la Paris Fashion Week cet automne, les symboles et inspirations naturelles et éthiques se sont fait visibles : conférences et défilés de Stella McCartney toujours plus pointus dans la recherche de matières, faites de coton biologique, de viscose dite "durable" ou de polyester recyclé, de fausse-fourrure entièrement recyclable… Ou encore chez Dior, qui reconstitue une forêt d’arbres - décor éphémère du défilé – mais qui rejoindront des projets de reboisement.

Lors de la Paris Fashion Week cet automne, les symboles et inspirations naturelles et éthiques se sont fait visibles : conférences et défilés de Stella McCartney toujours plus pointus dans la recherche de matières, faites de coton biologique, de viscose dite « durable » ou de polyester recyclé, de fausse-fourrure entièrement recyclable… Ou encore chez Dior, qui reconstitue une forêt d’arbres – décor éphémère du défilé – mais qui rejoindront des projets de reboisement.

Nous ne pouvons ignorer l’ambivalence du concept de « luxe », qui est en effet souvent associé à deux pôles de valeurs diamétralement opposées et qui cohabitent dans la vision des consommateurs : un luxe ostentatoire, emblème de tous les excès de la consommation, ou un luxe refuge, ancré dans des valeurs sûres, qui incarne une consommation sélective et durable. Mais aujourd’hui, de nombreux indices montrent que ce second pôle gagne du terrain avec une nouvelle vision du luxe de plus en plus largement partagée en Europe, aux US et en Chine – où la frénésie des luxury fans laisse place à une attitude plus experte et exigeante qui associe le luxe à une qualité exceptionnelle et durable des produits (+ 6 pts dans tous ces pays en 2019*). La place accordée à la seconde main, qui est en croissance en magasin ou en ligne, est également un indice de cette nouvelle façon de consommer la mode et les accessoires, qui se développe dans tous les pays et particulièrement aux US : +11 pts vs 2017.

Un luxe raisonné est-il possible ?

Même s’il possède une forte tradition d’engagement, le luxe reste cependant un secteur à risque par la rareté des composants extraits, par les liens du luxe expérientiel avec la mobilité (avions, bateaux, voitures de luxe…) qui comportent bien sûr des risques environnementaux – comme l’a mis en exergue le phénomène danois du Flygskam, ou « honte de prendre l’avion » et que les marques doivent intégrer comme un signal de vigilance. Cependant, de nouveaux mythes se dessinent : ceux associés à un luxe cool, sain, moral, largement porté par des « Key Opinion leaders » (KOL). Ces personnalités, souvent égéries des grandes marques, construisent aussi ces nouveaux mythes et incarnent des archétypes et des styles de vie élitistes et connectés à la Nature, largement investis dans des grandes causes comme Gwyneth Paltrow, Brad Pitt, Georges Clooney ou encore Robert Downey Jr. qui crée The Footprint Coalition pour nettoyer la planète en utilisant des technologies avancées.

Un engagement qui s’accélère en 2019

Au départ plutôt challengés par de petites marques premium, les leaders du luxe sont aujourd’hui très actifs dans la mise en œuvre d’actions pour intégrer les dimensions RSE en harmonie avec leur ADN, leurs projets d’entreprise et leur image de marque, ainsi que dans l’innovation par de nouvelles ressources, des filières fair-trade, des innovations vegan des textiles et cuirs… On comprend l’accélération à l’œuvre quand on regarde les chiffres de notre étude WLT 2019 sur les attentes des consommateurs en termes d’engagement éthique et environnementaux : La Chine en tête des pays concernés : Pour 90% de nos affluents chinois, la marque de luxe doit avoir des engagements éthiques et écologiques – niveau le plus élevé et en progression de 4 pts depuis 1 an ; c’est encore plus important pour les amateurs de luxe (96%) ainsi que pour les 18-25 ans (94% en progression de +17 pts depuis 1 an). L’Europe est également assez impliquée, notamment les Millennials : pour 61% des affluents, une marque de luxe doit avoir des engagements éthiques et écologiques ; c’est encore plus important pour les 18-34 ans (68%). Les Français sont 65% à penser qu’une marque de luxe doit s’engager. Les USA sont en dernière position de la zone étudiée cette année par le baromètre World Luxury Tracking d’Ipsos (pourtant souvent précurseurs sur les innovations éthiques) – avec seulement 56% des affluents américains qui attendent des engagements éthiques et écologiques des marques de luxe, et seulement 18% pour lesquels c’est très important. Par rapport aux autres zones, les préoccupations éthiques sont plus nettement portées par la Génération Z – les 18-25 ans – pour lesquels c’est un point important à 72%.

Vers quels scenarii possibles ?

Dans les études, la montée des exigences éthiques et écologiques des clientèles du luxe s’accompagne également d’une quête croissante d’innovation créative, mais aussi de valeurs sûres dans un monde incertain. Un phénomène qui ouvre une réflexion de fond sur la valeur, la durabilité des produits de luxe… avec des scenarii possibles assez nuancés : le risque d’un luxe éthique et inspiré par la nature très élitiste sur les modèles des KOL qui ont les moyens de cette vie vertueuse et raffinée… mais réservée à une petite élite. Ou bien l’opportunité d’une redéfinition d’un luxe positif pour des clientèles plus larges sur lesquelles les grands groupes comme Kering ou LVMH semblent se pencher, voire entrer en compétition depuis quelques mois : du Fashion Pact porté par François-Henri Pinault, aux efforts de sourcing éthique du groupe de Bernard Arnault, désormais plus visibles, notamment lors de leur conférence Future Life de septembre 2019. Des indices encourageants sur l’évolution des leaders de cette industrie.

*Source : Etude Ipsos World Luxury Tracking 2019

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