28 avril 2020

Temps de lecture : 26 min

Brooklyn Shelter, encore !

The Emotional Decency... Un concept que développe Michaël Boumendil, en refaisant le monde comme il semble en avoir l'habitude, ou le besoin. Bref, toujours aussi revigorant, son journal Brooklyn Shelter nous emmène à New-York, on oublierait presque, le temps de cette lecture que ce journal se déroule en ce moment ailleurs, de nos jours. C'est si étrangement inquiétant. Comment veut-il que son père ne lui demande pas où il est?

The Emotional Decency… Un concept que développe Michaël Boumendil, en refaisant le monde comme il semble en avoir l’habitude, ou le besoin. Bref, toujours aussi revigorant, son journal Brooklyn Shelter nous emmène à New-York, on oublierait presque, le temps de cette lecture que ce journal se déroule en ce moment ailleurs, de nos jours. C’est si étrangement inquiétant. Comment veut-il que son père ne lui demande pas où il est?

Journal du 16 avril 2020
35ème jour de confinement
C’est une petite remarque que le Président Trump a faite. Elle devrait faire bondir. Elle devrait faire la Une. Non, on s’en moque, on l’ignore. Le Président américain a dit qu’il pourrait suspendre le Congrès si celui-ci tardait à se mettre au travail sur les nouvelles mesures de lutte contre le virus. Le Président en a le pouvoir, mais aucun président n’a jamais osé jouir de ce privilège. Tout est un problème dans cette histoire. Cette remarque. Et le fait que personne ne prenne ça au sérieux.
Je reçois un long mail de l’un de mes confrères allemands, Hans. Un type bien qui a toujours voulu bien faire les choses dans son agence. Il souffre terriblement de la crise mais il se bat. Son agence est petite et sa trésorerie va lui permettre de tenir 2 mois. Autant dire qu’il se voit déjà mettre la clé sous la porte. Il s’emporte contre l’un de ses confrères allemands, qui est aussi un concurrent de Sixième Son. Hans joint à son message une étude et un classement publiés par ce concurrent qui m’en rappellent d’autres. Il ajoute « Lies and Bullshit ». En traduction libre, je propose « Mensonges et Pipo ». Comme Hans, j’ai beau relire, je pense que ce classement et cette étude sont une honte. C’est cousu de fil blanc. Cette agence allemande place ses clients au sommet et invente des chiffres qu’Hans ou moi pourrions démonter en 2 minutes. Hans finit son message en ajoutant. « Ils salissent notre métier et la réputation des vrais experts. Tous les coups ne sont pas permis pour surmonter la crise ». J’aimerais qu’il ait raison.
Le directeur de la communication d’une grande marque de distribution m’appelle. « Mon job, c’est de communiquer. À l’exception de la communication interne, mon instinct me dit que ce n’est pas le moment. C’est le moment de se taire, pas de prendre la parole. » Son agence veut le tirer dans une autre direction. Instincts de survie contradictoires. Quand j’ai défini ce concept d’Emotional Decency, je l’ai formulé en anglais pour 3 raisons. D’abord, parce que c’est ma langue de travail, ici à New York. Ensuite, parce que je vois un enjeu global pour les marques. Et que l’anglais est la langue des affaires dans la majorité des cas. Mais la principale raison est ailleurs. En anglais, decency veut autant dire décence que pudeur ou modestie. Or, je crois profondément au futur de ces notions pour la communication. Et je pense qu’elles sont l’inverse du marketing tel qu’on le bâtit depuis des années. Peut-être un certain marketing est-il en train de mourir. Sous nos yeux, les tensions entre le besoin et le désir deviennent plus évidentes. Ce qui consistait à créer du désir pour ce dont on n’avait pas besoin entre en conflit de façon plus flagrante avec cette volonté ou cette nécessité de renouer avec le vrai, l’essentiel. Le monde doit faire autant voire plus avec moins. Ça, on le sait depuis un moment. Emotional decency, c’est un appel à définir une stratégie émotionnelle qui permette de dire quelle émotion est juste pour une marque et quelle émotion ne l’est pas. C’est aussi définir des moments qui permettent à la marque de se mettre en scène légitimement. C’est être juste, tant dans le propos que dans l’émotion. C’est aussi avoir une vision plus pudique, plus retenue, moins exubérante et consumériste. C’est sans doute une nouvelle éthique de marque. Pas facile. Je ne suis pas naïf. Il y aura des cyniques. Il y aura ceux qui feront semblant et ne se poseront comme question que celle de leur intérêt et de l’opportunité à créer. Je le crois et le souhaite. Le cynisme mènera au dégagisme. À la condition que nous soyons clairs sur les nouvelles règles du jeu.
Les Mots Bleus. Christophe est mort. Je ne le connaissais pas. Un jour, je l’ai suivi dans la rue. Je sortais d’un rendez-vous au siège d’AXA dans le 8ème arrondissement, avenue Matignon. Il est passé devant moi. Difficile de ne pas le repérer. Son physique avait quelque chose d’étrange mais aussi de fascinant. De très petite taille, le beau bizarre comme il se chantait, semblait flottait. Et quand il a tourné rue du Faubourg Saint Honoré, j’ai décidé de marcher dans ses pas. Il est entré dans la boutique Smalto. Je suis entré aussi. Il parlait tout doucement, il semblait presque intimidé. Tout me semblait paradoxale. Un côté ombrageux qui allait avec un côté doux. Une veste à carreaux assez classique qu’il portait avec des santiags. C’est peut-être ça que j’aimé dans sa musique. Les paradoxes. La musique de Christophe, c’est la force des mélodies, leur beauté, leur assise et la bizarrerie des sons, leur texture souvent expérimentale. Christophe a essayé un costume à carreaux écossais bleu nuit. Il demande l’avis de la vendeuse. On le sent à la fois sur de son goût et peut-être finalement pas. Deux mois plus tard, je passerai à nouveau dans cette boutique. Le costume est en solde. C’est moi qui l’achète. Je suis effondré. C’est une mauvaise nouvelle que j’apprends à l’instant. Je n’en parlerai pas. Et je n’arrive pas à parler. Je ne peux plus écrire.

Journal du 17 avril 2020
36ème jour de confinement
La pression s’accentue ici pour la fin des confinements. Pas à New York mais dans le reste du pays. Pourtant, la courbe est loin de s’aplanir. Le graphique du Financial Times est sans appel. Ici, aux US, on en est encore à la phase d’accélération. Je ne serai pas surpris que certaines manifestations tournent à l’affrontement. Je ne serai pas surpris qu’on entre dans une période de profond délitement politique. Je pense que l’Administration actuelle pourrait sombrer et entraîner avec elle une partie du pays. Et ça pourrait pousser beaucoup d’Américains au divorce avec l’État fédéral, avec la structure même des États-Unis. Ce n’est pas un scénario catastrophe. La phrase du gouverneur de Californie, il y a dix jours, n’a pas été tellement commentée hors du pays. On en reparle ces derniers jours. Ce qu’il disait était pourtant choquant. Il parlait de la Californie comme « État-Nation », il parlait de sa capacité à « exporter » de l’aide aux autres états américains qui le souhaiteraient. Il parlait de la nécessité de rompre avec un état fédéral défaillant et qui « ne produit aucun résultat ». La Californie, c’est le plus grand état des États-Unis. Du bluff ou un signal faible qui en appellera d’autres ? Où mènera ce genre d’affrontement ? Jusqu’où peut aller cette énième division du pays ?
« Est-ce que le son et la musique, c’est plus décent que le reste ? » Je reçois ce matin l’appel d’un ami, Benoit, qui est aussi chef d’entreprise. Il comprend mal en quoi la musique a plus un rôle à jouer que l’image dans ce concept d’Emotional Decency. D’une certaine façon, il pointe vers moi un doigt accusateur. N’est-ce pas moi l’indécent ? Suis-je en train de faire de la récup’ à mon tour, consciemment ou inconsciemment. Je l’emmène tout d’abord sur un autre terrain. Depuis de nombreuses années, la crédibilité des médias est mise en doute. La confiance s’effrite. Le seul média qui réussisse à garder une majorité d’avis positifs, c’est la radio. Moins le média est sobre, moins il est crédible. Plus il multiplie le recours à l’image et à la vidéo, plus il est douteux. Plus l’image est présente, plus on la pense – plus on la sait ? – manipulatrice. Je me souviens de cette phrase de mon ami Pierre. « La radio, c’est le média le moins m’as-tu-vu, et pour cause. » Le « m’as-tu vu », c’est l’indécent. Le parallèle fait mouche. Benoit commence à me suivre. « Ok pour le son, me dit-il, tu as raison. Je me fie plus à ta voix quand tu me parles qu’à toi en train de me dire la même chose dans une vidéo. » On avance. Ensuite, je veux parler philosophie. La musique, pour Platon, c’est le langage de l’émotion. Schopenhauer ajoute que par essence, la musique rejoint l’âme dans un langage universel, celui du sentiment. Il parle bien d’essentiel. Il parle bien d’universel. Dans la musique, il n’y a pas ce premier degré du mot. Je ne veux pas entrer dans ce débat sans fin qui agite les linguistes et les compositeurs depuis le XIXème siècle pour savoir si la musique est vraiment un langage ou pas. Peu importe. Il y a dans la musique beaucoup de clarté. Je peux en témoigner. J’en ai fait ma vie. Je sais que la musique peut être terriblement claire et précise. Je peux le prouver à travers les dizaines d’études que j’ai menées à travers le monde, pour des dizaines de marques. J’ai consacré le premier chapitre de mon premier livre à cette question. J’ai pris le temps de creuser le sujet du rôle social de la musique, de sa façon d’opérer. La façon unique qu’a la musique d’être claire, c’est de procéder par association et par suggestion. La clarté, sans la suggestion, c’est l’explicite. C’est aujourd’hui une forme d’agression, d’intrusion. L’explicite n’est pas simplement vulgaire, il est indécent, il peut être violent. Il produit de la méfiance et du rejet. Il engendre une force contraire de plus en plus puissante. La musique, c’est l’inverse. Je tente une synthèse de ce que je pense du potentiel de la musique dans ces circonstances : la musique, c’est le langage de la clarté qui met les formes.

Quelque chose m’intrigue depuis le début du confinement. Quand je regarde par la fenêtre, je vois des gens se balader avec des sortes de gros sacs, des polochons, ou des sacs-poubelle jetés sur l’épaule. Gros et pas très lourds. Ce soir, au moment où nous sommes devant nos fenêtres et la porte d’entrée pour applaudir le monde de la santé qui tente de nous sauver, je vois passer un voisin avec ce même gros sac. Je lui fais signe. « Food ? », lui dis-je. « No, laundry. » Lisa, une autre voisine, me répond. « À New York, tout le monde a la climatisation, mais pas grand monde n’a de lave-linge et encore moins de sèche-linge. » C’est comme ça. Il ne faut pas chercher à comprendre. Je ne cherche pas. Je m’étonne.
Au sein de l’équipe, je sais que le temps commence à être vraiment long pour certains. Même ceux qui ne se sont jamais plaints, depuis le début, commencent à m’envoyer des signes d’impatience. En réalité, moi, aujourd’hui, ils me manquent. Parler avec eux, les voir par écran interposé, me fait de plus en plus de bien. C’est à moi, aujourd’hui, que je fais du bien en échangeant avec eux. Ce n’est pas le confinement qui me pèse. C’est le virus. Je sens qu’il se rapproche, qu’il nous encercle. Les chiffres prennent de plus en plus le visage de visages que je connais. Je n’aime pas ça.

Journal du 18 avril 2020
37ème jour de confinement
Il y a une crise dont on s’est beaucoup moqué et que les nouvelles du matin cachent de moins en moins bien. Une crise que la crise actuelle va enfin faire exploser. Ou du moins rendre impossible à ignorer. Entre 16% et 20% des Américains pensent que la Terre est plate. En France, c’est autour de 8%. Je me souviens que lors de l’élection de Donald Trump, un sondage montrait que la moitié de ses électeurs affirmaient croire à l’existence de réseaux pédophiles d’Hillary Clinton. J’ai gardé en mémoire ce long article du Washington Post de la fin 2016 qui montrait qu’une part incroyablement élevée d’Américains croyaient à des choses folles. À l’époque, j’avais réagi comme le Français que je suis. Ça m’avait plus fait sourire qu’alerté. Aujourd’hui, aux États-Unis, combien sont-ils à penser que cette histoire de virus n’est faite que pour les tromper, les déposséder, les déclasser encore davantage ? Il y a des gens qui ne veulent plus rien entendre. C’est fini. Je pense qu’aux États-Unis, ils sont nombreux. Bien plus qu’on ne l’imagine. Et dans cette période troublée, comment leur parler – car il faut bien leur parler ? C’est le problème de ces conférences de presse quotidiennes. À qui parle-t-on ? Les discours construits et censés n’alimentent-ils pas la folie de toutes ces théories ? Je pense que c’est comme cela qu’il faut lire les sorties de Trump que tant d’observateurs trouvent délirantes. Comment diriger un pays quand 30% de la population a quitté la sphère du raisonnable pour s’enfermer dans des théories qui nous semblent risibles tant leurs croyances nous paraissent caricaturales. En France aussi. J’ai été très choqué de cette théorie complotiste qui a circulé sur l’interdiction de la chloroquine et qui voulait démontrer le conflit d’intérêt entre Agnès Buzyn, son mari Yves Lévi, patron de l’Inserm, et qui auraient manipulé l’appareil d’État pour interdire la chloroquine. C’était choquant de voir circuler ce genre de choses. Moi, fils de pharmacien et de pharmacienne, je pouvais facilement décrypter que ce qui était décrit était tout bonnement impossible notamment sur le classement des médicaments. Plus choquant encore de voir qui relayait ce genre de propos. Tellement choquant de lire « De toute façon, un Monsieur Lévy, ça a toujours des intérêts cachés ». D’ailleurs, ici, les dernières manifestations anti-confinement se sont systématiquement accompagnées de slogans ouvertement antisémites, anti-noirs, anti-asiatiques. Dans ce moment où l’Humanité a l’occasion de se sauver, de donner le meilleur d’elle-même, n’ignorons pas que le pire n’est pas impossible. Il n’est pas loin. Ici, il pointe à nouveau son nez.
Nous sommes samedi et donc tous les écrans sont éteints. Je m’habitue à cette coupure hebdomadaire. Ce shabbat de déconnexion nous fait du bien à la minute où il débute. Samedi prochain, ce sera mon anniversaire. 49 ans. Je surprends ce matin les enfants, réunis dans une sorte de conseil familial. Le sujet du jour : mon anniversaire. Je ne me montre pas. J’attrape quelques phrases. C’est Bethsabée qui parle. « Papa a dit qu’on devait faire vraiment attention à l’argent actuellement. Alors on n’achète rien. » Elia semble troublée : « Ce n’est pas un anniversaire si on n’a pas de cadeau. » La solution est trouvée. « On va dessiner tout ce qu’on aurait voulu lui offrir. Et quand le virus sera parti, il pourra choisir quel cadeau il voudra en vrai ! », dit Eva Luna. Je n’entends pas ce que dit Gabrielle mais la réponse d’Elia me touche. « Je vais lui donner la moitié de mon argent de poche et je vais lui dessiner des billets d’argent. Je vais en dessiner beaucoup. »
Pas de lecture aujourd’hui. Pas de Monopoly non plus. Je ne suis pas d’humeur. Je suis de moins en moins d’humeur. Je m’enferme dans mes pensées. C’est une erreur. Je gamberge trop. Je commence à m’inquiéter sans plus de raisons aujourd’hui que les semaines passées et ça ne sert à rien. Isa en convient et tente de me raisonner. Elle me rappelle que la seule chose dont on doit s’inquiéter raisonnablement, c’est de notre bail. Il nous reste deux mois avant de devoir quitter cette maison. Nos discussions avec le propriétaire n’ont pas produit grand-chose. Il nous offre 15 jours supplémentaires. Nous avons donc jusqu’au 30 juin pour quitter les lieux. Pour aller où ?

Journal du 19 avril 2020
38ème jour de confinement
Ce matin, deux emails presque opposés appellent mon attention.
Patrick Mercier est le patron de l’agence de publicité Change. Le concept d’Emotional Decency lui parle. Il veut en discuter et me propose de l’appeler. Il répond immédiatement. Il veut aller plus loin et passer des paroles aux actes. « Comment faire pour faire ça ensemble ? » Patrick réfléchit depuis des années sur le sens des marques et la bienveillance dont elles doivent faire preuve. Patrick traduit à sa façon le sens de mon approche émotionnelle. « Les marques doivent être utiles. Leur communication aussi. Ce qui dépasse, ce qui est de trop, en termes d’image, de musique, d’émotions… Tu as raison. Ce n’était déjà pas nécessaire avant. C’est maintenant indécent. » Pour passer à l’action, Patrick me propose de creuser la question, par des études, par des recherches, par des confrontations aussi avec des réalités qui pourraient s’opposer à cette vision. Et il y a déjà des choses concrètes à faire. Patrick propose d’organiser un échange, soit avec les créatifs de son agence, soit avec certains de ses clients, pour porter ce discours auprès de ceux chez qui il doit faire sens. « Tu préfères parler aux marques ou à nos collaborateurs ? », me demande-t-il. « Je préfère les deux », lui dis-je. « Alors je te rappelle demain pour qu’on avance. »
L’autre email vient d’un annonceur. Jean-Michel est un Directeur marketing étonnant. Plein de certitudes. Plein de doutes. Il joint à son message un lien vers trois publicités. Il y a la campagne Dove « Courage is Beautiful », celle du Crédit Agricole accompagnée de la chanson de Charles Aznavour « Formidable » et la campagne de Colgate en soutien à l’Organisation Mondiale de la Santé. L’email qu’il m’envoie s’appelle « Indécent ». Un court message accompagne ces liens. « De la récup’, encore de la récup’ et le pire, c’est la musique. On s’en parle ? » Je n’ai jamais dit que la musique ne pouvait pas être indécente. Au contraire. Le pathos qui dégouline, la musique sait bien faire. Les faux-semblants, les beaux sentiments à bon compte, la musique sait parfaitement jouer le jeu. Ce que je dis, c’est que la musique peut être un formidable vecteur d’émotions et de messages sans verser dans l’indécence et la surenchère. À condition de savoir-faire. À condition de définir ce qui est juste et ce qui ne l’est pas. Je dis que la musique peut faire mieux que les mots et les images pour porter une marque avec clarté et pertinence. À condition de changer d’approche, d’interroger le sens de la marque, de renoncer à des ressorts faciles et de savoir sur quel territoire musical on peut évoluer légitimement. Je ne trouve pas le film Crédit Agricole indécent. Je pense qu’il aurait été plus juste s’il n’y avait pas eu de musique du tout dans la première partie. Je pense que le Crédit Agricole a de bonnes raisons de se croire juste, parce que les banques sont en train de jouer un rôle essentiel et salvateur dans cette crise. Je crois qu’il était simplement inutile de vouloir enchanter le réel et finalement le détourner en utilisant une musique si connue et sans doute un peu facile. Je crois même que j’aime bien le film Crédit Agricole mais que la musique de Charles Aznavour le vampirise. Elle écrase le film de son empreinte. C’est peut-être ça qui entache le film. Peut-être pour ça que Jean-Michel le trouve indécent. Je l’appellerai demain.
À la maison, les enfants ne comprennent plus très bien ce que je fais de mes journées. Théo vient me le dire. « Papa, on n’arrive plus à savoir quand tu travailles, quand tu ne travailles pas. Tu travailles tout le temps maintenant ? » Isa me l’avait fait remarquer vendredi, je n’ai presque pas déjeuné en famille depuis lundi dernier. À dire vrai, je n’ai pas déjeuné tout court de la semaine. Trop de choses à faire. Je me suis couché tard presque tous les soirs. Je quitte mon ordinateur quelques instants et les rejoins en cuisine pour les démentir. Je m’assois. Au bout de 5 minutes, Isa voit bien que je ne tiens pas en place. « Tu as une idée, c’est ça ? » Elle a raison. « Vas-y ! », me dit-elle avec un grand sourire. Je me lève et retourne travailler. Combien de temps Isa restera-t-elle bienveillante et compréhensive ? Je contribue de moins en moins à la vie de la maison.
Les images des manifestations anti-confinement du Texas sont à regarder de près. Celles d’Austin m’impressionnent. C’est la ville progressiste du Texas. Beaucoup de jeunes, pas un seul Noir, pas de Latinos ou très peu. Beaucoup de pancartes qui dénoncent la tyrannie, la manipulation, le mensonge. Ce qu’ils défendent, c’est la vie, la liberté, la vérité – disent-ils. « On ne fera pas de nous des prisonniers sans qu’on se batte », dit un manifestant. Voilà une autre façon de comprendre l’explosion des ventes d’armes dans le pays. De l’autre côté de l’échiquier, les scientifiques. Celui que j’écoute ce matin donne un point de vue simplement chiffré de la situation. « Actuellement, nous effectuons environ 140 000 tests par jour. Pour empêcher le virus de redémarrer dans un potentiel déconfinement mi-mai, il faudrait que nous fassions entre 500 000 et 700 000 tests par jour d’ici là. Sans quoi un déconfinement serait un saut dans le vide. Nous ne sommes pas en mesure de faire autant de tests. »
J’appelle mes parents. Je vois tout de suite qu’ils sont en forme. Ils sourient et parlent comme si j’étais dans la pièce avec eux. Mon père, qui a toujours eu un faible pour Isa, commence par me demander de ses nouvelles. Ma mère me demande des nouvelles des enfants et me donne une leçon. « C’est bien de travailler, mon fils, mais c’est mieux de t’occuper de ta femme et de tes enfants. Tes enfants, ce sont des diamants. Tu entends ? Des diamants. Garde-les, protège-les. » Elle joint le geste à la parole et pointe son doigt vers moi. « Il faudrait qu’ils commencent par être polis » lui dis-je. Ce mot d’esprit fait flop. Ma mère passe à travers. Elle dessine à nouveau un diamant avec ses doigts. Ça m’apprendra. Mon père me demande à quoi ressemblent nos journées. Les journées de mes parents ressemblent à celles des écoliers. Mes nièces font avec eux des exercices de maths, des découpages et des coloriages, des baccalauréats aussi. Et ça marche, ça les tient en éveil et ça les amuse. « On fait reculer l’âge en rigolant », dit Rachel. Et puis, subitement, mon père s’approche de la caméra et formule une question étrange : « Tu habites où, toi ? » Il y a ne serait-ce que 2 ans, j’aurais été très peiné par cette question, qui montre que parfois son esprit dérape. Aujourd’hui, cela m’amuse. Que son esprit déraille à 10%, 20%, 30%, qu’importe. Tant qu’il restera avec nous et que nos échanges auront du sens, je me réjouirai. Tant qu’il y aura un fil entre nous qui permettra d’échanger… Tant qu’il trouvera du sens à la vie, je me réjouirai. Pourvu qu’il déraille encore longtemps comme ça. Je mime le signe que faisait ma mère. Le diamant. C’est mon père, c’est ma mère que l’on garde comme des diamants. Ils sont le cap qui guide et qui unit la tribu.

Journal du 20 avril 2020
39ème jour de confinement
Je n’ai jamais été fort en maths mais je croyais que je savais compter. Les chiffres que je lis ce matin ne veulent pourtant plus rien dire pour moi. Je suis dépassé. Les nouvelles de ce matin portent moins sur le nombre de cas, le nombre de morts, que sur les dollars que le pays déverse. Les trilliards de dollars du plan Trump montrent déjà leurs limites. Au bout de quatre jours, le plan PPP et son volet pour les petites entreprises est déjà à court d’argent. La Maison Blanche et l’opposition démocrate se sont finalement rapidement entendus pour ajouter 450 milliards de total à l’addition. Une petite rallonge qui ne durera pas longtemps non plus. Je relis l’article. Je relis ce commentaire. 450 milliards de dollars. Une petite rallonge. Qui prend la mesure de ce dont on est en train de parler ?
Deux des trois banques françaises avec lesquelles nous travaillons ne nous répondent plus. Nous avons demandé la suspension du remboursement de tous les prêts sans exception. Et tout cela tarde à se mettre en place. Cette lenteur me gêne dans mon travail au quotidien. Elle m’inquiète et me laisse désœuvré. Les banques nous expliquent qu’elles ont légalement besoin des compagnies d’assurance qui assurent les prêts pour pouvoir procéder à la suspension des échéances. Et les assurances ne répondent pas. Et moi, entre les deux, je suis censé faire quoi ? Je ne peux pas accepter l’attente. J’ai des prévisions à tenir et des comptes à rendre. En premier lieu, aux salariés de l’agence. Je sais qu’ils m’accordent leur confiance mais qu’il en faudrait peu pour en perdre un peu. Je n’ai pas seulement une obligation de moyens pour nous sortir de cette crise. J’ai une obligation de résultats.
Un ancien dirigeant de Procter & Gamble m’écrit ce matin. Je le classe parmi les supporters vigilants de l’Emotional Decency. Il est allemand, francophone, vivant aux États-Unis depuis 10 ans après avoir vécu en Asie. C’est un observateur très avisé du monde des marques. Professeur à la Colombia Business School et à la New York University. Il joint à son email une interview que le nouveau patron d’Unilever donnait l’an dernier, peu de temps après son arrivée. Dans ce long papier, Alan Jope explique que chacune des marques de son groupe doit se définir par un but, une communauté et une cause. « Les marques qui parlent bien sans faire du bien poussent les consommateurs à la défiance face à la publicité. » Drôle de formulation. Celui qui m’écrit achève son mail par une question simple. Il appuie là où ça fait mal : « Le patron fait-il du bien pour faire de la pub, ou fait-il de la pub pour pouvoir faire le bien ? Est-ce le règne du cynisme ou le nouvel ordre du business ? ».
« On croyait qu’on était intégrés dans la plus belle des tours de Babel. En fait, on n’était que des immigrés. » C’est à cela que je pourrais résumer mes conversations de ces derniers jours avec les gens du quartier et nos amis de New York. À l’instant, j’apprends qu’un couple canadien avec qui nous avions sympathisé rentre au pays après onze ans ici. Un autre couple, français, décide de rentrer. Ils ne pourront plus payer la scolarité des enfants à la rentrée. Un autre couple, franco-brésilien, a déjà fait ses valises parce que « attendre ne fait qu’aggraver les choses ». Avant, toutes les raisons étaient bonnes pour venir vivre à New York. Aujourd’hui, toutes les raisons sont bonnes pour partir. Tenir tient de la folie, de l’inconscience ou d’une chance effrontée – si on les écoute. Isa et moi nous regardons. Nous ne pourrons pas échapper bien longtemps à cette discussion. Au-delà des cas personnels des uns et des autres se dessine un autre New York. Cette ville à l’effervescence insolente, cette ville dont l’énergie irradie le monde, se retrouve chaque jour amputée d’un peu de sa différence. D’un peu de sa richesse.
À New York, il y a deux mois, on trouvait du travail en un claquement de doigts. Le nombre de nouveaux chômeurs a augmenté ce mois-ci de plus de 2500%. Et encore. Ce chiffre est bien en-dessous de la réalité. Le système d’inscription est saturé au point que bien des gens ont renoncé à s’y enregistrer. De tous ceux qui ont demandé des aides jusqu’à présent, pour eux-mêmes, pour leur entreprise ou leur famille, personne à ma connaissance n’a reçu quoi que ce soit. New York demain sera sans doute un autre New York.
Je dois finir de faire les comptes familiaux. J’ai commencé hier. Cela m’a rassuré. On ne dépense plus grand-chose et c’est tant mieux. Il y a deux ou trois trucs qui clochent dans ce que j’ai vu. Il y a une chose qui cloche vraiment plus que les autres. Je ne vais pas m’emballer. Je vais faire ma petite enquête pour éviter toute conclusion hâtive.

Journal du 21 avril 2020
40ème jour de confinement
Me voici donc invité à prendre la parole devant les étudiants de la NYU Stern, la New York University dont le logo violet fleurit un peu partout à Manhattan. Le thème : « Comment rendre les marques plus fortes : identité sonore et musiques de marque ». Dans un paragraphe qui sert d’introduction au module, le responsable des cours me demande d’expliquer comment ne pas se tromper. « Je te préviens, me dit-il, mes étudiants sont sceptiques à l’idée qu’un Français puisse leur apprendre quoi que ce soit en matière de musique. » J’avais entendu exactement la même phrase il y a 15 ans. En rendez-vous avec le patron de BT, British Telecom, à Londres. À l’issue de notre réunion, il me lançait : « Ça fait un peu mal. Un Français vient de nous apprendre des choses sur la musique. Je dois dire qu’on était sceptiques. No offense. ».
Patrick Mercier me rappelle. Sans surprise, il avance vite. Il réfléchit et approfondit. « Il ne faut pas que l’Emotional Decency soit comprise comme une impossibilité de faire de la pub. Ni comme une mode. Il faut formuler les choses comme un cadre de possibilités, pas d’impossibilités. » À l’entendre parler, je comprends que c’est un publicitaire qui m’explique que la pub n’est pas forcément la solution. « On peut faire des choses formidables – et les marques doivent en faire – sans avoir besoin de s’en vanter ou d’en faire un film à la télé. » Cela me fait penser à une doctrine Talmudique que Saint-François de Sales avait reformulée et qui disait : « Le bruit ne fait pas de bien, le bien ne fait pas de bruit. ». Une nouvelle doctrine de communicant. Une proposition concrète pour l’Emotional Decency. Une vision qui donne du corps à la sobriété.
À New York, il y a environ 900 écoles privées. Sans elles, le système scolaire exploserait. En maternelle comme en primaire, la scolarité dans ces écoles coûte en moyenne 22 000 dollars par an. C’est à peu près le double au collège et au lycée. De très nombreuses familles se saignent pour envoyer leurs enfants là-bas. L’équilibre précaire de nombre d’entre elles se construit autour de ces « tuitions », de ces frais de scolarité. L’argent n’achète pas le confort, ni même la garantie d’une ascension sociale. Et comme si ce n’était pas déjà assez dur, le système peut être fou. L’entrée au collège et au lycée, à New York, répond à une logique de concours. Dans le public, comme dans le privé. On soumet des enfants, de 10 ans pour le collège, de 13 ans pour le lycée, aux affres des évaluations, des auditions et des classements. Dans certaines circonstances, le supplice se double d’un tirage au sort. Les résultats des concours sont tombés il y a un mois mais les cartes vont être rebattues. Pas pour le meilleur. Combien ont déjà signé pour des écoles qu’ils ne pourront plus payer ? Combien vont devoir quitter la ville parce qu’ils ne trouveront plus dans le temps et le budget qui leur reste des établissements décents pour accueillir leur progéniture après l’été ?
Ma plongée dans les comptes bancaires de la famille m’a fait tomber sur un os. Et cet os est gros. Il y a tout un tas de petits débits en provenance de Microsoft. Des petits ruisseaux, beaucoup de petits ruisseaux, qui font de grands totaux. Notre carte de crédit est associée à la Xbox. Sans ça, impossible de jouer. De toute évidence, depuis quelques semaines, c’est open bar de ce côté-là. J’appelle Théo. Plus je lui détaille les dépenses provenant de la Xbox, plus ses yeux s’embuent. Deux possibilités : soit il me prend pour un idiot, soit il y a un bug, et pas un petit. « Théo, montre-moi comment tu joues à Fifa. » Je n’ai pas besoin de rester longtemps à côté de lui pour comprendre. À chaque partie, la console lui propose d’acheter des points, pour constituer de meilleures équipes. La façon dont ces achats potentiels se présentent est très tentante. Il y a un côté très ludique. Je le crois quand il me dit qu’il n’imaginait pas que ces achats n’étaient pas autre chose que virtuels. « Moi, je pensais que j’avais le droit d’acheter parce que j’avais gagné des parties. » Il est face à moi. Je l’attrape par les épaules. La honte, la peur et une certaine sidération. Ses larmes glissent abondamment sur ses joues. « Si tu avais su, tu aurais fait quoi ? ». « Je t’aurais demandé si je pouvais le faire ? ». C’est ce que je voulais savoir. Je ne dois pas être le seul à qui ce genre de mésaventure arrive. Le site internet de la Xbox en a connu bien d’autres avant moi et dans le même cas. Il y a un formulaire « Demande de remboursement : achat de mon enfant. » Je suis la procédure et je demande que soient annulés tous ces achats que je n’ai pas autorisés.
Jean-François Laforge, Directeur des Marques et de la Communication commerciale de Michelin, a accepté de témoigner lors du webinar que nous ferons avec Epoka le 7 mai. La marque, ses émotions et le formidable potentiel du son et de la musique. « Tu vas me passer à la question ? », me demande Jean-François. Sans doute pas moi. Les autres participants vraisemblablement. Ils auraient tort de s’en priver. Jean-François a une riche expérience. Je lui fais remarquer qu’il est bien placé pour s’en sortir avec les honneurs. Il y a deux mois, Ipsos sortait une étude très poussée sur les atouts de marques. L’Institut comparait la création de richesse pour les marques dans les relations avec leurs publics. Combien rapporte d’investir dans une couleur, dans un logo, dans une police de caractères, dans une célébrité, dans un packaging… Une étude poussée et documentée. Résultats : les deux éléments de marque qui dominent le classement et donnent le plus de force à la marque sont la création de personnages et celle d’une identité sonore. « Tu as Bibendum et tu as ta musique. C’est toi le gagnant. Bingo ! ».
Ma sœur se remet mais je m’attendais à ce que sa forme revienne plus rapidement. Chaque jour est un progrès mais la fatigue qu’elle me décrit est toujours accablante à certains moments de la journée. Elle n’a que onze ans de plus que moi. Et moi, si cela devait m’arriver…

Journal du 22 avril 2020
41ème jour de confinement
J’ai passé la nuit sur cette maxime de Saint-François de Sales. Le bien. Le bruit. Quand la MAIF redistribue 100 millions d’euros à ses sociétaires parce qu’ils ne conduisent pas pendant le confinement, la marque n’en fait pas une pub. La marque communique mais ne s’est pas promue à en parler. Le bruit ne fait pas de bien, le bien ne fait pas de bruit. Le grand-père d’Isa en avait fait une doctrine de vie. Il récoltait des fonds et les redistribuait dans des enveloppes qu’il glissait anonymement dans des boîtes à lettres. Il prenait soin d’identifier ceux qui en avait besoin. Les identifier, sans se faire repérer pour ne pas les heurter. Eux n’ont jamais su que c’était lui. Lui n’en a jamais parlé – sauf à sa femme et à ses enfants qui l’aidaient dans la distribution. Le bruit ne fait pas de bien. Dans la bouche du grand-père d’Isa, j’avais entendu le mot frugal. Un mot plein de sens. Frugal, ça voulait dire faire beaucoup avec une légitime économie de moyens. Frugal, ça voulait dire juste, ni trop, ni trop peu. Il y a quelques années, le concept de Frugal Innovation prenait son envol, notamment dans le monde du design, inspiré par un livre indien. Patrick Mercier me parlait de communication frugale. La frugalité, la sobriété, la justesse. Une autre lecture de cette Emotional Decency.
La sortie du Président Trump la plus commentée ce matin dans la presse américaine est partie de ce Tweet par lequel il annonce suspendre toute immigration. Il ne faut pas s’y perdre. Au début c’est tout, puis ce n’est que les cartes vertes. Ensuite c’est tous secteurs confondus, mais certains ont besoin d’une main d’œuvre étrangère et protestent. Finalement, ce sera peu de monde. Enfin, à l’échelle des États-Unis bien sûr. Les commentateurs calculent ce matin. Cette sortie qui se veut patriotique du Président américain pourrait coûter leur emploi à 660 000 personnes.
À trois jours de mon anniversaire, je sens monter une forme d’excitation chez les enfants. Pas chez moi.
Notre voisin du bout de la rue rythme désormais les applaudissements de 19h à sa manière. Il ne lésine pas. Feux d’artifices. Le vacarme est total. Et si la décence nous empêche de crier « Oh la belle bleue », Isa, les enfants et moi y pensons. Pour répondre à ces exploits pyrotechniques, le reste de la rue délaisse le fait-main des applaudissements pour le fait-métal. Le concert de casseroles répond sans complexe aux bruits des explosions. Et ce soir, ça me saute aux yeux. Nous sommes tous devenus fous. La petite vieille d’en face mime une danse qu’elle seule semble connaître. Nos deux voisines de droite, qui se sont toujours détestées, communient en rythme et par ustensiles de cuisine interposés. Notre voisin italo-américain à gauche, Chris, se déhanche sans grâce mais avec bonheur, un masque sur le visage, sa petite dans les bras. La famille qui habite en face et qui est arrivée récemment doit avoir sa pudeur. Ou alors une batterie de cuisine trop neuve pour qu’on la maltraite. Ils préfèrent pousser des cris que de taper dans le Téflon. Fou. On devient fou. Même Chris se tourne vers moi et d’un doigt sur la tempe en prend conscience. « Crazy, Man ! » Ça tape de plus en plus fort. Ce rythme bizarre prend les allures d’une vénération païenne, expiatoire et jubilatoire. Et comme souvent quand un son m’interpelle, j’appuie sur la touche REC. Crazy. Une chanson des années 2000 dont le succès populaire n’a pas toujours rendu hommage à la force du texte, à la simplicité touchante de la mélodie. Crazy. Je rentre et fait tourner en boucle le son de la rue. Il accompagne ma voix et ma guitare. REC.

Merci Michaël pour notre petit cadeau, c’est par ici!  https://soundcloud.com/user-925049975/crazy-street-casserole-brooklyn

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