16 mai 2018

Temps de lecture : 4 min

L’artisan, nouvelle figure de l’authenticité

Le besoin d’authenticité est le thème du quatrième opus de la collection de livres « Françaises, Français, etc... », co-produit par 366 et Kantar Public. Quatre grandes tendances et plusieurs sous-tendances y sont analysées et seront publiées en exclusivité chaque semaine par INfluencia. Cette semaine : le besoin de sens pour l’action.

Le besoin d’authenticité est le thème du quatrième opus de la collection de livres « Françaises, Français, etc… », co-produit par 366 et Kantar Public. Quatre grandes tendances et plusieurs sous-tendances y sont analysées et seront publiées en exclusivité chaque semaine par INfluencia. Cette semaine : le besoin de sens pour l’action.

Être soi-même, c’est également faire soi-même. La quête d’authenticité passe par le fait maison et la valorisation des savoir-faire traditionnels. Engouement toujours non démodé pour la cuisine, essor des loisirs créatifs, récup’ et recyclage des objets au sein d’une économie collaborative en pleine expansion, on essaie d’en revenir à un “ faire ” authentique, très loin des modes de production industriels traditionnels et standardisés. 69 % des Français déclarent ainsi qu’il leur arrive de recycler ou de réparer des objets plutôt que de les acheter.

Brocantes, plateformes de troc, vide-greniers, “ repairs cafés ” : contre l’obsolescence programmée, l’économie collaborative donne une seconde vie aux objets et s’instaure en pratique de consommation partagée et majoritaire. Dans ce monde où les réflexes antigaspi et les vieilles recettes de grands-mères sont tendances, le do it yourself a le vent en poupe. Cet été, nous raconte  Influencia, une centaine de personnes de vingt-cinq nationalités différentes ont participé dans le Périgord à la construction d’une maison “ magique ”, recyclée et durable, autonome et autosuffisante, et intégralement construite à partir de déchets (pneus, bouteilles, canettes…) collectés au préalable. Une maison “ fait maison ”, à l’impact de construction nul sur l’environnement.

Savoir-faire

Chacun devenant artisan, les “ vrais ” artisans retrouvent une noblesse et un lustre perdus depuis bien longtemps. Un peu ringard et dépassé, “ poujado ” et mal aimé il y a quelques années, l’artisan redevient une figure sociale valorisée, en ce qu’il incarne à la fois une forme d’ancrage territorial (l’artisan n’est ni mondialisé, ni délocalisable) et d’authenticité des savoir-faire et des processus de fabrication. 87 % des Français s’accordent en effet pour dire que quand ils achètent un produit ou un service, “ la dimension humaine et les gens qu’il y a derrière ” comptent beaucoup pour eux. Dans une société de la défiance et du soupçon à l’égard des grandes multinationales, l’artisanat parvient en effet, à l’inverse, à tisser un lien très fort de confiance avec les consommateurs. 90 % de nos compatriotes déclarent avoir une “ bonne opinion ” de l’artisanat et des artisans en France, 81 % leur “ font confiance ” et 77 % se sentent “ proches ” d’eux. Ce taux de confiance les situe 36 points au-dessus de la confiance accordée aux grandes surfaces, 39 points au-dessus de celle octroyée aux grandes entreprises privées et plus de 60 points à celle accordée aux banques !

La figure de l’artisan (même s’il arrive que vous le trouviez cher quand il vous fait un devis !) cristallise tout ce que les Français prisent dans le monde d’aujourd’hui : le petit vs le gros, le proche vs le lointain, l’humain vs le déshumanisé, le local vs le global. Plus de huit Français sur dix jugent ainsi que l’artisanat “ propose des produits de qualité supérieure à ceux des grandes surfaces ”, favorisant le made in France et permettant une consommation responsable en privilégiant les circuits courts. Au final, plus de sept sur dix préfèrent acheter un service ou un produit auprès d’un artisan que dans une grande surface. Dans une société où tout ce qui est grand, financier et capitalistique est devenu suspect, l’artisanat, parce qu’il incarne la proximité, le lien et l’authenticité, retrouve une vraie modernité et se construit du coup aussi en réponse pour une consommation plus vertueuse et plus humaine. Le Fonds National de Promotion et de Communication de l’Artisanat a parfaitement saisi la tendance : après avoir longtemps valorisé “ la première entreprise de France ”, il invite désormais, dans sa campagne lancée le 6 novembre dernier, tous les Français à “ préférer l’artisanat ”, collant ainsi à cette vague de réorientation des pratiques de consommation.

Fondée sur l’authenticité des savoir-faire et des procédés de fabrication, cette (re)valorisation sociale du rôle et de la figure de l’artisan est une tendance tellement forte qu’elle contraint les grandes marques à la transparence sur leurs procédés de fabrication et les pousse à tenter de faire valoir leur propre facette “ artisanale ”. Depuis 2013, LVMH a ainsi créé les “ Journées Particulières ” pour “ mettre en lumière la diversité de ses métiers et de ses savoir-faire ”. Rencontrer le menuisier qui conçoit les célèbres valises Vuitton, échanger avec le contremaître viticole de Moët & Chandon ou encore pénétrer dans les ateliers Dior et Guerlain… le consommateur est appelé à toute une série d’expériences et d’immersion pour voir comment ses produits fétiches sont conçus et fabriqués dans le respect de savoir-faire authentiques et traditionnels. La dernière édition a rassemblé 145 000 visiteurs dans cinquante-trois lieux en France et en Europe.

En matière agroalimentaire, Michel et Augustin fait tout, du packaging au naming, pour apparaître plus “ artisanal ” que ses grands concurrents “ industriels ”. La marque insiste par exemple sur le fait que tous les fromages de ses biscuits apéritifs sont AOP, ce qui précise-t-elle “ garantit leur origine et leur typicité et assure qu’ils ont été fabriqués selon un savoir-faire transmis de génération en génération ”. Son siège, La Bananeraie, est “ un lieu de vie convivial et incroyable ”, ouvert toute l’année au public afin de montrer comment est fabriqué l’ensemble de ses mignardises et de ses gourmandises. L’enjeu ici est de taille, car en communication les résultats sont éminemment réversibles : le message est-il crédible ? Les signes ne suffisent plus dans ce contexte, il faut aux marques des preuves et une transparence totale pour générer de la conviction.

L’expérience client

L’importance marketing de l’expérience client, de l’engagement, trouve ici une traduction essentielle. La matérialité des marques et des prestations redonne une place éminente au retail, à la distribution physique comme point de contact d’image et de conviction… et pas nécessairement comme point d’achat. Ainsi, Kantar estime que les points de contact “ expérientiels ” contribueraient à hauteur de 48 % dans l’activation du capital des marques. “Alors que nous passons de plus en plus de temps dans le monde digital, c’est le temps passé loin de nos écrans que nous apprécions toujours plus, le temps passé avec de vraies personnes et de vraies choses”, reconnait Frank Rose, JWT “ Embracing Analog : why physical is hot ”.

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